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Résistance et transition

18 novembre 2016

L'avenir n'est plus ce qu'il était

Toi qui regarde tes pieds en ces jours sombres, lève les yeux et regarde l’horizon, l’horizon de ce que tu veux atteindre. Ne te laisse pas gagner par la morosité, la fatalité. Contrairement à ce que tu crois, nous sommes toujours aussi nombreux, nous avons simplement cessé de parler. Et cette parole, nous devons la reprendre. Parler lorsque nous sommes témoins d’une situation de violation des droits humains, parler pour ceux qui souffrent, humains et non-humains, parler lorsque la simplicité du raisonnement semble primer sur la compréhension profonde d’un monde effrayant de complexité. Retenir aussi que si ce jour est un revers, il y en eu d’autres et il y en aura d’autres. Nous devons plutôt compter et regarder nos victoires.

Plus que jamais et au sens premier nous devons rassembler, sur les places, dans les lieux de pouvoir, dans les lieux de production, les forces vives de notre union. Rassembler, ce n’est pas refuser de « se radicaliser » comme disent les media. Être radical aujourd’hui n’a plus aucun sens puisque cela veut dire faire simplement partie des 95% de personnes, peut-être davantage, qui ne se reconnaissent pas DU TOUT dans le système économique néolibéral et la façon dont il compromet la survie même de notre espèce. Qui voudrait construire un monde basé sur un paradigme entièrement différent, revisité, pluriel. Rassembler donc, autour de valeurs fortes, et en cela radicales, mais pourtant inclusives : la prise de décision par consensus, des échanges non marchands, le rejet des discours fascisants. Se réapproprier le langage et ne plus utiliser les expressions systémiques puisque le langage précède la pensée et le façonne.
Non, ceci n’est pas un démantèlement mais une déportation, ceci n’est pas un licenciement économique mais un accaparement des bénéfices, ceci n’est pas un dommage collatéral mais un meurtre étatique, ceci n’est pas une assignation à résidence d’écoterroristes mais la privation de libertés d’opposants politiques, ceci n’est pas une crise économique mais une économie de crise. Reconnaissons ainsi Donald Trump pour ce qu’il est. La potentialité d’un nouveau génocide. Mais se lamenter ne sert à rien. Tout ce qui s’est produit depuis vingt ans dans le monde occidental a convergé vers ce moment puisque nous n’avons pas désiré suffisamment ardemment l’empêcher. Parce que nous l’imaginions impossible. Parce que nous pensions pouvoir reconnaître le mal, même sans moustache.

« Là où croît le péril croît aussi ce qui sauve. » Hubert Reeves

Ce que nous construisons par nos mots, nos quotidiens, par les mille gestes que nous désirons partager, ne contribue pas simplement au changement, il est le changement. Le colibri de la fable, celui qui essaye d’éteindre le feu, ne trie pas simplement ses déchets pour les mettre dans la bonne poubelle, il met la totalité de son énergie vitale dans l’espoir de pouvoir reconstruire sur plus que des cendres. Il nous faut du courage, du courage pour changer, du courage pour convaincre, pour expliquer notre point de vue sans jamais être dogmatique. Partager les outils que l’on connaît pour s’émanciper. Lire, échanger avec ce qui nous est étranger. Du courage, nous en avons plus que jamais puisque nous reconnaissons l’étendue de la menace. Il nous faut aimer ce qui ne nous ressemble pas et reconnaître que, même lorsque l’on veut inclure tous les êtres dans son cercle de compassion, qu’ils soient humains ou non-humains, noirs, jaunes, verts ou mauves, lorsque l’on souhaite consciemment ne pas exclure, ce n’est pourtant pas si facile. Nous devons néanmoins, je crois, essayer. Et être inclusif dans nos démarches pour ne pas s’isoler et rendre ce monde binaire, entre ceux qui ont peur et ceux qui ont peur de ceux qui ont peur. Le pouvoir nous enjoint à choisir une couleur. Es-tu rouge irréaliste ou bleu carnage ? Je ne suis ni l'un ni l'autre et encore moins entre les deux.

Je me lève simplement contre la barbarie qui vient.

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3 novembre 2016

Comment exister encore ? Capital, techno-science et domination - par Louis Marion (écosociété, 2015)

Comment_exister_encore

Je cherche désormais dans mes lectures, entre deux romans de science-fiction dystopique, carnet de voyage ou recueil de poésie à garder un oeil sur les philosophes contemporains et leur rapport à la domination et au basculement de notre société dans la gouvernance technocratique. C'est donc avec beaucoup d'attention que j'ai lu le dernier ouvrage de Louis Marion, philosophe, essayiste et conférencier québécois qui s'attaque ici dans le plus dur du paradigme occidental en régime néolibéral.

Habilement, l'auteur décrit les nouveaux enjeux découlant de la notion de travail abstrait, c'est-à-dire qui ne découle pas d'une activité, mais de la valorisation du capital-temps humain. Ces concepts et leur définition rigoureuse permettent de mettre en avant l'absurdité de la notion-même de travail salarié, qui donne à notre civilisation ses allures hors-sol.

Le libéralisme, que j'ai longuement défini et débattu dans mon article sur les traités de libre-échange, se trouve sociologiquement atomisé sous la plume de Louis Marion. Il décrit le capital non pas comme une oppression d'une partie de la population sur l'autre (vision marxiste) mais la domination d'un automate hors de contrôle sur toute vie, humaine ou non-humaine, qui survit grâce à l'autorenforcement par une instrumentalisation du langage. Ce qui lui permet une transition élégante vers les dégats causés par la technocratie, sans laquelle un capitalisme sauvage n'est pas possible. Ainsi l'auteur développe une thèse intéressante selon laquelle la technologie ne serait pas neutre politiquement, puisqu'elle peut difficilement se passer de croissance. La machine, si elle fait gagner du temps et de l'énergie de façon considérable, est également demandeuse de consommable (énergie, matériau à transformer, dépannage humain) qui doit lui être offerte dans un flux ininterrompu. Il paraît donc farfelu de résoudre les problèmes causés par la technologie par davantage de technologie, puisque celle-ci consomme des ressources non-renouvelables et ne fait qu'aggraver les dynamiques sociales et environnementales déjà désastreuses.

Vous l'aurez compris et ce n'est guère un secret, Louis Marion est un philosophe de la décroissance écosociale, qui prône l'autodétermination et une lutte contre l'austérité par la réappropriation des outils de production et de l'économie sociale, avec des penchants autonomistes forts, comme le prouvent ces nombreuses citations du Comité Invisible. Sans afficher une farouche technophobie, il appelle tout de même à une régulation importante de la puissance technique pour des motifs environnementaux mais aussi éthiques. En effet, notre puissance technologique a dépassé notre compréhension mais aussi et surtout notre capacité à empatir. Le fait d'être dépassé par son propre impact sur autrui provoque de graves dissonances cognitives qui conduisent à un mal-être de civilisation. Si je peux par mon seul acte d'acheter une marchandise bon marché nuire à davantage de personnes qu'il me sera jamais possible d'en aider, si je peux en appuyant sur un bouton tuer davantage de personnes qu'il m'est possible d'en pleurer, si l'on peut sans haine aucune détruire notre seul habitat de façon irrémédiable, c'est que la technique a dépassé notre capacité d'abstraction et qu'elle n'est plus devenue que nocive.

 

Je ne peux que vous inviter, convaincus ou non, à vous atteler à cette lecture qui m'a permis de préciser un grand nombre de concepts qui étaient encore flous dans mon esprit.

22 septembre 2016

La poésie sauvera le monde, si rien ne le sauve

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C'est sur ce postulat de départ qui fera rire les "sérieux" que Jean-Pierre Siméon débute son essai terriblement vivifiant sur l'importance de conserver la poésie comme outil d'insurrection de consciences par le contrepied qu'elle prend sur le langage outrancièrement matérialiste de la "société des racontars", où les médias ne laissent pas de place à l'interprétation et où seule l'image objective est vénérée.

J'ai dévoré ce livre à l'écriture fluide et lyrique, bien que manipulant des concepts abstraits et complexes, car il faisait un écho véritablement tangible à une réalité que j'ai toujours ressenti, sans pouvoir la cristaliser en mots. La poésie dont parle JPS est bien celle de Rimbaud et de Verlaine mais c'est aussi celle que l'on griffonne dans le métro ou sous un arbre, tout autant que celle que sans écrire, on vit. Le subjectif est un outil extrêmement puissant pour redéfinir son rapport au vivant et aux autres de façon non-rationnelle, afin de permettre la recherche de satisfactions d'ordre spirituel et affectif, non matérielles.

Tout le monde a besoin de poésie, celle qui précéde et matérialise l'amour. Y compris et surtout ceux qui sont privés de confort et de sécurité. Les plus grands poètes sont résistants, révolutionnaires, exilés,... Dans un camp de réfugiés, on parle d'amour autant, voire même davantage, qu'ailleurs. La poésie ne sera donc jamais un luxe, elle est une nécessité, elle est ce qui fait de nous des humains. Elle libère et transcende, elle agit sur le réel en modifiant le regard que nous avons sur lui.

Une lecture salutaire, importante, non dogmatique, au pays des dogmes et des fatalismes.

18 août 2016

De l'inégalité parmi les sociétés - Jared Diamond

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De toutes les questions posées par les actuelles dynamiques socio-économiques et géopolitiques, l'écrasante majorité est indéniablement englobée par la question de la suprématie de l'Eurasie et des alliances qu'elle a forgées pour l'asseoir et la maintenir. Il ne s'agit pas dans cette tentative d'y répondre de partir d'un point de vue qualitatif ou dogmatique mais d'engager une recherche objective des causes environnementales des inégalités actuelles et de la pression pour les ressources exercée aujourd'hui par l'Occident sur le reste du monde.

Comment en est-on arrivée, en résumé, à une Europe conquérant le Nouveau Monde (les Amériques), l'Afrique et l'Océanie, à l'exception de quelques îlots hostiles ou inaccessibles ? C'est la question à laquelle s'attèle Jared Diamond, l'auteur du prophétique "Effondrement", dans cet essai de plus de 600 pages sur les origines de la domination d'une partie du monde sur le reste.

Il faut avouer que le questionnement lui-même amène à bousculer certains tabous. Il dérange simplement par sa formulation. Car si l'on commence à poser la question, cela amène à d'immédiates conséquences : accepter cet état de fait des massacres et pillages perpétrés par notre civilisation, aller donc contre le déni ambiant et embrasser la non-légitimité de la richesse sur laquelle l'Occident s'est construit, mais aussi s'engager sur un terrain que personne ne semble vouloir emprunter, rechercher les causes de la domination et risquer de patauger dans la fange du suprémacisme blanc. Il n'est rien de plus éloigné ici de la volonté de Jared Diamond, qui livre une étude complète de géographe sur la façon dont l'environnement et les conditions initiales de conquête spatiale des civilisations ont forgé les dynamiques actuelles.

Ce livre se découpe en une quinzaine de chapitres évoquant, par ordre logique et chronologique, les facteurs environnementaux qui ont amené l'Eurasie à développer une culture étatique tandis que d'autres autochtones sont restés des chasseurs-cueilleurs. Sans nécessairement vous gâcher la lecture d'un livre parfaitement articulé, je vous propose une approche simplifiée mais, je l'espère, n'écorchant pas le propos. Ce questionnement qui englobe tous les autres est important à cerner pour tout militant ou toute personne qui se réclament simplement de l'humanisme.  

Je crois avoir, par la lecture du livre, retenu trois aspects environnementaux généraux autorisant des raccourcis sans entacher la pertinence et la justesse de l'étude.

De la domestication des plantes

Le développement d'une culture humaine complexe reposant sur la spécialisation des métiers et une hiérarchie de notables ne peut s'envisager que dans le cadre d'une production alimentaire sous forme d'agriculture. Les populations de chasseurs-cueilleurs sont extrêmement limités dans leur possibilité de se spécialiser car une grande partie du temps de vie est dédiée à la recherche de nourriture. L'Eurasie et surtout l'Europe, dans cette optique, a bénéficié de deux atouts considérables : un climat doux et surtout ne souffrant pas d'extrêmes pluies ou sécheresses, mais aussi, par une évolution biologique favorable des plantes sauvages sous ce climat, d'un nombre considérablement supérieur de plantes domesticables en comparaison des autres continents.  

Diffusion des cultures : avantages de l'axe ouest-est du continent eurasien

Lorsque l'on regarde sur une carte, on s'aperçoit aisément que le continent eurasien est le seul à posséder un immense axe ouest-est. L'Afrique est peu large et traversée par le Sahara. L'axe principal des Amériques est nord-sud, coupé en deux ou presque par l'isthme de Panama. L'Océanie est une poudrière, peu propice aux échanges culturels intenses entre régions, même avec de bons bateaux. L'avantage conféré par cet axe ouest-est de plus de 12.000km n'est comparable à aucun autre ; il permet la diffusion des plantes domestiquées qui s'adapteront facilement tout le long des parallèles du globe grâce à des climats favorables. Il encourage également les déplacements humains et le commerce, formidable émulateur de développement technologique par le partage de connaissances mais aussi de concepts et de faisabilité (émulation créatrice et inventive), par la faible présence de barrières naturelles et la quasi-absence de maladie tropicales.

Croissance démographique : massacres avec et sans épée

De par l'arrivée précoce de l'homme sur le continent eurasien depuis l'Afrique, de nombreux mammifères ont co-évolués avec l'humain, permettant la survie et la différenciation d'une abondante macrofaune (à l'inverse des continents peuplées tardivement comme l'Australie et les Amériques où la macrofaune, qui ne craignait alors pas l'homme, a été exterminée). La macrofaune africaine est pour la même raison la plus riche encore aujourd'hui mais aussi la plus sauvage et indomptable, justement parce qu'elle a connu l'apparition du genre Homo sur Terre et coévolué avec lui depuis le début. Le nombre d'espèces animales domesticables, comme pour les plantes, fut très supérieur en Eurasie et, de fait, fut à l'origine de la principale raison de la disparition des peuples autochtones en Amérique et en Océanie : les germes qui ont muté des animaux domestiques pour devenir des maladies humaines spécifiques. Ce facteur, combiné à l'écrasante domination technologique des Européens, mena à la quasi-disparition des indigènes sur tous les continents.

Quid des différences génétiques ?

Pour ainsi dire, Jared Diamond ne les aborde pas, il balaye d'un revers de main l'hypothèse selon laquelle la génétique des populations joua le moindre rôle sur l'histoire des cultures humaines. Régulièrement et grâce à une rigueur scientifique exceptionnelle, il rappelle que lorsque la domestication d'une plante ou d'un animal, l'invention d'une technologie ou une assimilation culturelle avec des voisins apportait une amélioration nette de la qualité de vie d'une société et que cette dernière était réceptive à cette époque précise, elle a eu lieu, sans considération aucune des populations concernées. Il rappelle ainsi que les peuples ne possédant pas aujourd'hui d'agriculture ni de technologie avancée sont le résultat d'une évolution simplement différente et qu'ils ne peuvent pas être considérés comme "intellectuellement" primitifs puisque c'est un environnement hostile à l'agriculture qui les a fait développer la chasse et la cueillette, plutôt qu'une quelconque déficience.

En somme, une lecture saine et intelligente qui permet de relativiser beaucoup de nos croyances passives sur la supériorité empirique de certaines civilisations sur d'autres.

22 juillet 2016

Nous sommes l'état de nécessité

A nos élites, le gouvernement, les complexes militaro-industriels qui contrôlent les media, ceux qui décident d’envoyer des soldats français bombarder des positions soi-disant stratégiques et ont tué des centaines de civils, d’hommes, de femmes et d’enfants innocents en Syrie. Ceux qui arment le Moyen-Orient et tous les ennemis des droits humains dans le monde, à hauteur de plusieurs centaines de milliards de dollars par an.
Vous êtes en guerre, pas nous.

Aux lobbyistes qui ont une vision si court-termiste qu’ils acceptent de donner et recevoir près d’un milliard d’euros de pots de vin par an à Bruxelles pour bloquer les lois exigeantes au niveau social ou écologique, rajoutent ces alinéas qui permettent de les contourner, rajoutent ces délais qui laissent tout loisir aux multinationales de continuer les mêmes pratiques « seulement encore quelques années, c’est promis ». A ceux qui négocient TAFTA, CETA, TISA ou les futurs accords de libre-échange avec la Chine.
Vous voulez davantage d’argent, pas nous.

Aux politiques qui ignorent l’opinion publique et légifèrent la libéralisation sauvage, la fin des droits des travailleurs, vendent les services publiques, pillent l’état pour sauver les banques. A ceux qui achètent la paix sociale en subventionnant les éleveurs pour faire oublier que la grande distribution prend une marge brute supérieure au coût de production, ceux qui exonèrent d’impôts les entreprises qui sponsorisent les manifestations sportives et veulent endormir les aspirations collectives de liberté, d’égalité et de fraternité par du pain et des jeux. Ceux qui regardent avec bienveillance l’évasion fiscale et condamnent en justice les lanceurs d’alerte comme Antoine Deltour. Ceux qui n’ont jamais demandé à la grande distribution le paiement des amendes de fraude aux permis de construire des supermarchés, suffisant pour effacer la dette de notre paix.
Vous voulez davantage de pouvoir, pas nous.

Aux media qui aspirent à une guerre civile et qui pour ça sont prêts à faire passer ceux qui luttent contre le néolibéralisme pour des terroristes, qui traitent de casseurs ceux qui ont le malheur de se camoufler le visage pour ne pas être fichés, ne parlent jamais des luttes frontales contre le système et si peu souvent de constructions alternatives, juste un peu pour faire joli et pouvoir se défendre d’être des vendus.
Vous voulez contrôler nos esprits, vous échouez.

A ceux qui ordonnent à la police d’encercler les manifestants, de les charger, de les gazer, sans qu’ils sachent que ces derniers sont nassés et n’ont aucun moyen de se replier ailleurs. A ceux qui déploient des policiers en civil pour tabasser en douce les gens habillés en noir à la sortie des manifs. A ceux qui assignent à résidence sous couvert d’état d’urgence, ont ordonné de bloquer des citoyens engagés dans la Bourse du Travail le 28 juin pour les empêcher d’aller manifester. A ceux qui mandatent des policiers déguisés pour casser et vandaliser des lieux symboliques parce qu’au bout d’une heure, ils n’ont pas réussi à pousser des centaines de « sauvages » encerclés et excédés, à le faire.
Vous voulez nous diviser, vous échouez.

A l’extrême-droite qui se réjouit des morts, des mutilés des attaques contre la France et nourrit un amalgame froid et pervers, s’assit sur le bon sens, scande les mêmes refrains délétères depuis vingt ans, croit qu’elle a gagné en puissance, en crédibilité, en éligibilité, en promettant une sécurité que seule la paix interne, l’amour et la tolérance nous apporteront. Les otages de Daesh disent que les terroristes sont sans arrêt sur les réseaux sociaux pour savoir comment on communique autour de leurs actes et qu’ils sont extrêmement déroutés lorsque l’on diffuse des messages de paix et d’amour pour les communautés musulmanes. Si vous n’avez pas compris ça, Marine et Marion, vous êtes et vous resterez toujours sur la touche.
Vous voulez la peur, nous ne vous la donnerons pas.

A tous ceux-là, ceux qui pensent nous gouverner, nous contrôler, nous garder en état de stase. Vous avez tort. Nous sommes debout, nous sommes libres, nous sommes ingouvernables.

Vous avez perdu.

L’alternatif énergétique, social, agricole, monétaire, fleurit partout. Le peuple a conscience de vos manigances, il ne vous fait plus confiance. Il s’organise. Il fait autrement. Il fait lui-même. Il se parle. Vous avez raillé Nuit Debout, pourtant même si le mouvement lui-même ne rassemble plus autant sur la place de la République et partout en France, les gens désormais se connaissent, ils ont parlé de leurs espoirs, ils se sont comptés.

En manifestation, une foule de plus en plus intelligente et solidaire se construit, capable de s’organiser en street medics, en milice de rue pour protéger les citoyens des charges de police, en media indépendants en première ligne malgré les dangers, en une diversité sublime à faire pâlir le soleil. Pendant que la police gaze les blessés à terre, ces blessés qu’elle est si mauvaise à compter, les manifestants forment des cordons spontanément, les medics soignent. On est loin de ces foules enragées dont on parle sur BFM TV.

Mais c’est dur pour les élites d’avouer qu’elles ont perdu, que ceux qui veulent la chute du système ne sont plus une minorité, que ceux contre lesquels elles luttent ne sont pas une horde informe mais un système stratégique avancé, solidaire et déterminé, qui gagne chaque jour du terrain sur le mensonge institutionnalisé et le terrorisme d’état.

Rendez-vous à la rentrée alors, lorsque ceux qui profitent de leurs congés payés rentreront de vacances avec une gueule de bois au goût de 49.3... J’espère que vous serez prêts.

Car nous, oui. Nous n’oublions pas l’article 35 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 24 juin 1793. Nous sommes debout et libres. Déterminés mais toujours et avant tout pacifiques. La paix seule peut mener à un monde meilleur.

Vous êtes en guerre parce vous agonisez, mais nous, nous ne faisons que naître.

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20 juillet 2016

"Je vis dehors, dedans je meurs"

Damasio-ZoneDehors

Aujourd'hui, je viens de finir le meilleur livre de science-fiction dystopique que j'ai jamais lu et qui est pourtant une oeuvre assez largement inconnue du grand public, La Zone du Dehors d'Alain Damasio.

"Ce livre a été écrit dans un but, unique : comprendre, en Occident, à la fin du vingtième, pourquoi et comment se révolter. Contre qui ? ajouteront certains en guise de prolongement, mais déjà ça glisse, ça devient incertain et flaqué, car la question, que posent ces nouveaux pouvoirs auquel chacun de nous est aujourd'hui confronté, dans son corps, aux tripes même, sans le vouloir, sans s'en dépêtrer, d'où qu'il se tienne, hautain même, indifférent ou narquois, cette question est devenue : contre quoi ?"

L'histoire se situe en 2084, pour le clin d'oeil au roman d'Orwell, et met en scène la civilisation nouvelle d'une élite exilée sur les anneaux de Saturne, alors que la Terre sombre dans le chaos d'une guerre chimique. Dans cette nouvelle démocratie totalitaire où les désirs des citoyens sont provoqués, analysés, normés et où la hiérarchie est définie par le Clastre (un grand examen où chacun est évalué par rapport à son intelligence, sa sociabilité, sa personnalité et ses aptitudes), seule la Volte, un organisme révolutionnaire qui recherche les soubresauts de la vie dans l'aseptie, se débat pour changer les choses. La Volte sans le "ré", c'est "ce qu'il y [a] au creux de [nos] ventres, ce qui bouge encore là-dedans."

"Souriez, vous êtes gérés." Le décor de la trame narrative que je n'entends en rien décrire ici (je vous laisse lire cette fabuleuse histoire), est simplement un prolongement, le plus probable, d'une société de consommation qui irait dans le sens d'une démocratie "juste".

Que voulez-vous citoyen ?

- Plus de confort.      - Plus de sécurité.   - Une hiérarchie où les plus sages et les plus généreux guident.

- Accordé.                  - Accordé.                  - Accordé.

- Plus de temps libre et de loisirs.             

- Accordé.

Aux utopistes, ce livre oppose un réalisme qu'il est difficile de dénier, surtout si le point de départ d'une révolution démocratique se faisait dans le terreau du capitalisme et de la société de consommation, maintenue sur pied par la peur de l'autre et le matérialisme.

Si on demandait leur avis à ceux qui n'ont rien à se reprocher, ils le donneraient. Ils modèleraient l'avenir avec force caméras, puces dans le corps, péages, supermarchés, véhicules individuels et réalité augmentée (comprenez télévision holographique et jeux vidéo immersifs). Voilà le monde idéal pour le citoyen-modèle.

Alors, contre qui on se bat ?

Contre les médias qui normalisent la pensée et les désirs, les transformant en besoin à assouvir immédiatement.

Contre l'éducation, qui au lieu d'élever l'homme, de développer son potentiel créatif et collaboratif, l'enferme dans la peur de l'autre et la compétition.

Contre soi-même.

"Ce qu'il faut faire ? D'abord arrêter de se lamenter et descendre de la croix ! Enlever les clous dans les mains ! Tous les pouvoirs ont intérêt à nous communiquer des sentiments tristes, des sentiments pauvres. A nous de leur opposer un peu de subversion et de joie de vivre."

"POUR QUE VIVE LA VOLTE !"

20 juillet 2016

Le fable du colibri ou comment détourner un conte révolutionnaire pour asseoir l'emprise du capitalisme totalitaire

Un jour, dit la légende, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux terrifiés, atterrés, observaient impuissants le désastre. Seul le petit colibri s’activait, allant chercher quelques gouttes avec son bec pour les jeter sur le feu. Après un moment, le tatou, agacé par cette agitation dérisoire, lui dit : « Colibri ! Tu n’es pas fou ? Ce n’est pas avec ces gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ! »

Et le colibri lui répondit : « Je le sais, mais je fais ma part. »

J'adore cette fable. Ce blog en porte la marque. Mais je ne supporte plus l'explication qu'on en donne et ses conséquences sur la perpétuation d'un certain fatalisme et l'apologie des "petits gestes" de la vie quotidienne. "On va dans le mur, mais j'ai mis ma brique de lait dans la bonne poubelle, ce ne sera pas de ma faute."

Comme un enfant de cinq ans le comprendrait aisément, la fable du colibri n'est pas celle des petits gestes qui changent petit à petit le monde, comme l'interprétation édulcorée et erronée qui en est faite par la doxa majoritaire capitaliste et totalitaire. Le colibri est petit mais il dirige la totalité de son énergie vitale vers un objectif plus élevé que lui-même. Il ne recycle pas trois boîtes de conserve, il ne donne pas dix euros par mois à une association, il ne fait pas une heure de bénévolat par semaine sur son temps libre. Ces gestes perpétuent le système, le nourissent par une déculpabilisation de l'individu et une formidable capacité à projeter de la poudre aux yeux. Or, cette fable ne prône rien de tel. Le colibri est engagé dans une tentative qui l'implique totalement, dans son énergie physique et intellectuelle, vers l'objectif d'éteindre le feu.

La force de travail de l'homme est son principal moyen d'agir sur le monde qui l'entoure, loin devant l'utilisation de son budget ou la gestion de ses déchets, mais la majorité des citoyens, subissant des pressions sociales immenses, ne se l'appropriera jamais plus que très partiellement au cours de sa vie. Pour redresser notre société malade, inhumaine et vouée à la destruction par la raréfaction des ressources non-renouvelables, chaque être humain a le devoir et la nécessité matérielle de disposer de son énergie dans le sens du bien commun, ou au moins, de celui de son bien individuel, ce qui est déjà une avancée formidable.

Il ne peut y avoir de remise en question du paradigme sociétal sans remise en question du travaillisme sur lequel il repose et sur l'utilisation de l'énergie humaine à des fins laborieuses, dans un contexte général. Le système est en effet alimenté par ses membres et si ces derniers décident d'exercer leur plein droit de disposer de leur énergie et de leur temps, ce système s'écroule instantanément. Le mythe selon lequel, si une personne ne remplit pas une fonction, une autre le fera à sa place contribue à confier pour toujours tout pouvoir à une caste de tricheurs. Or, dans le cas d'un boycott général de certaines tâches humainement, socialement et environnementalement destructices, une activité donnée ne serait plus perpétrée puisque les dominants ont besoin de fourmis besogneuses pour maintenir leur emprise.

12 juillet 2016

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12 juillet 2016

UEMSSI 2016 à Besançon : Module sur le néolibéralisme et le libre-échange - Jour 1 - Généralités

Notes prises à l'occasion de l'Université d'Eté des Mouvements Sociaux et de la Solidarité Internationale 2016 du 6 au 9 juillet sur le Campus de la Bouloie à Besançon.

Module « Vers la fin du régime de libre-échange ? Luttes pour démanteler le pouvoir des multinationales et pour un régime commercial au service des droits humains. » - Jour 1/3

Sans réellement d’introduction, les intervenants nous ont immédiatement mis à contribution afin de répondre par groupe d’une dizaine de personnes à trois questions : 1) Comment définir le néolibéralisme en trois mots ? 2) A qui profite le régime de libre-échange ? 3) Quel est le problème posé par ce système commercial ?

Avant de restituer ces discussions, je me propose de redéfinir un peu le néolibéralisme.

Il s’agit de notre régime de commerce actuel, qui succède au capitalisme basique (celui de la révolution industrielle) puis à l’impérialisme (capitalisme au temps des colonies, régime d’accaparements). Le néolibéralisme est donc une strate du capitalisme dans un contexte de grandes inégalités déjà établies entre le Nord et le Sud, les petites entreprises et les multinationales, l’oligarchie et les citoyens. En procédant à la dérégulation totale du commerce, les acteurs économiques dominants, sous couvert de liberté et de libéralisation de tous les aspects de la vie, réalisent une prise de pouvoir total au niveau politique, économique et culturel sur les peuples. L’étape prochaine de ce régime est la systématisation des traités de libre-échange nouvelle génération (de type TAFTA-TTIP sur lequel je reviendrai longuement dans l'article-restitution du deuxième jour du module) via un réseau de proche en proche permettant au marché mondial de ne constituer qu’une seule et même entité profitant seulement aux acteurs déjà dominants, sans considération aucune pour la santé, l’écologie, les droits humains et la démocratie. Le néolibéralisme est en fait un système basé sur un éternel présent au service du seul profit.

1) Comment définir le néolibéralisme en trois mots ? Pour définir le néolibéralisme par trois mots, j’ai proposé un brainstorming. Les mots émergeants de la discussion dans notre groupe furent : Dérégulation, opacité, multinationales, mondialisation, globalisation, compétitivité, accaparement, violences, exploitation, profit, pouvoir, inégalités, croissance, liberté, jungle, injustices. Parmi ceux-ci, nous avons décidé de retenir Globalisation – Compétitivité – Accaparement. Je préférais à ce dernier mot le terme d’Exploitation car il me semblait mettre en exergue le fait d’une utilisation de l’humain comme de la nature mais finalement, nous avons voté pour Accaparement. Chaque mot met en avant un aspect, « Globalisation » la dimension, « Compétitivité » le principe et « Accaparement » la dérive.

2) A qui profite le régime de libre-échange ? Nous avons été rapidement d’accord pour émettre une réponse en trois volets : - les multinationales, - la finance, - l’oligarchie (une élite des acteurs économiques dominants)

3) Quel est le problème posé par ce système commercial ? Le débat a mené à un accord sur le « problème des problèmes », celui dont découlent tous les autres : la privatisation des pouvoirs politiques (les lobbies n’autorisant plus le pouvoir étatique à prendre en compte les volontés populaires par un chantage à la croissance économique et à l’emploi et pesant manifestement sur les décisions géopolitiques et une idéologie d’Etat extractiviste et d’exploitation de l’homme et de la nature). De ce problème-clé découlent les autres : l’augmentation des inégalités, le changement climatique et les déplacements de populations dus aux conflits pour les matières premières.

Historique du capitalisme

Sa naissance remonterait à l’époque charnière entre le Moyen-Âge et la Renaissance mais l’essor véritable de ce dogme n’advient qu’à la fin du XVIIIème siècle. Les 30 glorieuses, après la Deuxième Guerre Mondiale, voient l’apparition de la deuxième phase du capitalisme, l’Impérialisme, où les firmes multinationales commencent à prendre le contrôle des décisions étatiques et assoient leur emprise grâce aux ressources fournies par les colonies des pays industrialisés, maintenant les actuels pays en développement dans un état de servitude (exportation de toutes les richesses vers le Nord, création artificielle et éhontée d’une dette des pays du Sud envers l’Union Européenne et les USA, esclavage visible et non visible, etc). Enfin, l’apparition du néolibéralisme dans les années 70 marque l’entrée dans un capitalisme total et totalitaire mondial qui, par une perte de souveraineté et l’affaiblissement des frontières étatiques, envahit, grâce une culture du spectacle et de la publicité limitant les résistances potentielles, tous les aspects sociaux et interpersonnels de la société, contribuant activement à son démembrement. Il s’agit d’une entreprise de décivilisation par l’intensification des flux déjà existants jusqu’à phagocyter tous les aspects de la vie dans une ultime tentative de maintenir de la croissance (brevetabilité du vivant pour l’accaparement des ressources alimentaires mondiales, capitalisation du service à la personne et des services écosystémiques, …).

Idéologie

L’idéologie néolibérale s’appuie sur le dogme de l’humain en tant qu’homme économique. Selon cette idéologie, l’être humain serait motivé uniquement par l’appât du gain et par son intérêt personnel. Il serait en outre non influencé par son environnement social et culturel (métaphore de « Robinson Crusoé sur son île déserte » souvent invoquée par les néolibéraux). Cette idéologie se veut donc hégémonique ; elle se dit « dans l’ordre des choses » et bénéfique à tous car répondant à la « nature humaine ». Le dogme d’un marché pur et parfait dans ce contexte est entravé par les états dans la volonté de passer du commerce local à un commerce totalement globalisé. Dans cette optique, il est naturel et souhaitable pour les libertés individuelles de dépasser les Etats en détruisant les mesures publiques de régulation du marché (normes, protections et cotisations sociales, principe de précaution, …).

Au-delà de l’intérêt d'apprendre à contenir le réflexe vomitif qu’écrire ce paragraphe m’a immédiatement provoqué, je reste persuadée qu'il est nécessaire de bien connaître un ennemi pour le combattre. L’intérêt de redéfinir le paradigme néolibéral est d’en comprendre conséquemment les contradictions internes afin de pouvoir contrer d’éventuelles argumentations en faveur du système et lui retirer son statut de système naturel alors qu’il s’agit d’un système imposé.

Idée n°1 : L’humain est attiré par l’appât du gain. Alors pourquoi constate-t-on une telle résistance à un système pourtant totalitaire sur le plan culturel et économique ? Pourquoi, si l’humain est-il foncièrement et naturellement égoïste, voit-on partout fleurir l’alternatif, le solidaire, alors même que la majorité silencieuse, si elle n’agit pas et est très mal informée, n’est néanmoins pas exempte de critique envers le système. Ce que l’on constate en fait, c’est que l’humain est déconstruit en homme économique mais que ce n’est pas son état naturel.

Idée n°2 : L’humain n’est pas influencé par son environnement. L’argument le plus facile à déconstruire dans une optique de globalisation où l’humain n’est plus justement que la somme de ses interactions avec le système et les autres humains. Nier le caractère social de l’humain ne s’argumente même pas, il se balaye d’un revers de main et avec grand mépris. Le néolibéralisme s’appuie sur la non-humanité de l’humain.

Idée n°3 : Le pouvoir de l’état doit être annulé pour augmenter les libertés individuelles. Cependant, ce que l’on constate aujourd’hui, c’est au contraire le renforcement du pouvoir étatique, qui est utilisé par les acteurs économiques dominants à leur profit en lui appliquant le vocabulaire de l’entreprise et en l’utilisant comme milice de son hégémonie d’où une militarisation de la police (très visible en France depuis la mise en place de l’Etat d’urgence en novembre 2015). Le dogme néolibéral utilise cet adage : « La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres. » Pour les citoyens, il est devenu clair que « La liberté des uns s’arrête là où s’arrête aussi celle des autres. »  d’où une convergence des luttes de plus en plus visible.

Idée n°4 : Le néolibéralisme met tous les individus sur le même plan et lui autorise les mêmes chances. Bien entendu, cet argument ne tiendrait que dans un système libre et non faussé, loin du nôtre. Les rapports de force existants se renforcent lorsque les protections légales des plus faibles acteurs sont supprimées. On voit que la libre circulation des capitaux peut se faire dans les deux sens mais que la libre circulation des personnes est de plus en plus contrainte dans le sens Sud-Nord. Les Etats-Unis, à la fois très libéraux et protectionnistes, sont un exemple très parlant de politique impérialiste extrêmement unilatérale.

Contexte actuel

Aujourd’hui, de nouveaux outils s’offrent aux néolibéraux pour étendre l’emprise du système et donc de la « crise » qui est le mode de fonctionnement normal du capitalisme (les trente glorieuses ayant été une parenthèse, pas si glorieuse que cela par ailleurs). La strate néolibérale du capitalisme, qui n’est pas vraiment une nouvelle étape mais un fonctionnement parallèle supérieur de celui-ci, tend à augmenter la financiarisation de l’économie (spéculation et économie non basée sur les ressources), la numérisation des systèmes de production, la dérégulation et l’uniformisation au sein des états, la délocalisation pour davantage de polarisation (Asie – Pôle industriel, Afrique et Moyen-Orient – Pôle Matières premières, USA/UE – Pôle financier), ainsi que l’extension au secteur du vivant (biotechnologies et brevetage du vivant).

Un aspect cependant favorise tous les autres : la dérégulation par l’établissement de traités internationaux de libre-échange qui sont en fait des accords internes au sein des lobbies mais prenant la forme d’accords entre deux états ou groupes d’états. Ces traités dits bilatéraux, comme TAFTA entre l’UE et les USA, tentent de prendre un contrôle total sur les lois de régulation du marché déjà existantes (et en amont sur les projets de loi) par la création de la Coopération Réglementaire. Cet organisme transnational, s’il voit le jour, permettra aux multinationales de s’arroger le droit d’exercer une pression économique et financière sur les états ayant, en vigueur ou en étude de projet, des lois qui entravent ou entraveraient, selon la coopération réglementaire, le libre-échange qui est, toujours selon le dogme, dans l’intérêt des populations.

Ces traités ont également pour but d’être des moyens de pression pour la signature d’autres traités interconnectés et donc pour la création d’une grande toile commerciale, permettant au Nord de garder sa sphère d’influence sur d’anciennes colonies ou états fusionnés (ex-URSS) diminuant ainsi les gaps entre les différentes actions antidémocratiques prises par les états et les entreprises pour annihiler la résistance citoyenne et augmenter le pouvoir des lobbies et des multinationales.

L’opacité et l’anonymat de l’oligarchie, désormais avérés, est un outil redoutable qui a permis de passer du patronat identifiable à une caste d’actionnaires et de financiers dont la responsabilité au niveau social et écologique ne peut plus être mise en cause de façon simple.     

En gros, c’est la merde.

Que répondre si on nous dit : « Il faut signer TAFTA ! Les Chinois vont nous manger sinon ! » ?

Premier argument : Les multinationales soi-disant françaises ou européennes ne le sont en fait pas. Il n’y a pas de nationalité des transnationales car elles sont déterminées par un actionnariat qui est ouvert au monde entier, dont le seul but est le profit, pas des considérations nationalistes.

Deuxième argument : Abaisser les normes en général, c’est permettre aux produits américains, mais aussi chinois par conséquent, d’être plus compétitifs sur notre marché qui, pour l’instant, est relativement normatif.

Troisième argument : Euh, ben en fait, on est aussi en train de signer un truc avec les Chinois alors bon…

Quatrième argument : Sur l’investissement qui est le cheval de bataille des néolibéraux, l’expérience et l’histoire doivent parler. L’argent ne va pas forcément dans les pays qui sont les moins régulés. Le continent africain ne représente que 10% des investissements mondiaux, pour preuve.

12 juillet 2016

UEMSSI 2016 à Besançon : Atelier 1 - Smartphones au Sud

Notes prises à l'occasion de l'Université d'Eté des Mouvements Sociaux et de la Solidarité Internationale 2016 du 6 au 9 juillet sur le Campus de la Bouloie à Besançon.

Atelier « Smartphones et médias sociaux au Sud, des révolutions en cours… au service d’autres développements ? »

Je me suis rendue à cet atelier un peu par provocation étant donné ma critique ouverte vis-à-vis des smartphones, du coût social et environnemental de leur fabrication, du caractère immensément transitoire de cette technologie qui n’est pas soutenable d’un point de vue des matières premières, et de toutes les dépendances associées (dépendance à la technologie elle-même, aux multinationales qui la produisent) ainsi que le problème de la gestion et de l’utilisation commerciale des données récoltées sur les consommateurs. Néanmoins, je sais aussi que les smartphones rendent actuellement, notamment en Afrique, des services considérables au niveau social, sanitaire et économique, qu’il est difficile de dénier. Il me semblait donc pertinent de me renseigner sur cette problématique et de mettre un peu d’eau dans mon vin au contact de personnes ayant une opinion radicalement opposée, ce qui est toujours enrichissant.

Les intervenants de l’atelier faisaient partie de quatre associations utilisant les réseaux sociaux pour sensibiliser à leurs problématiques, notamment :

- l’OADEL, ONG sensibilisant à la consommation de produits locaux plutôt qu’importés et à la nutrition de bonne qualité en général au Togo

- Pour un Autre Monde, autre ONG œuvrant auprès des étudiants pour limiter l’exode rural en sensibilisant pour la restauration des terres dégradées via la permaculture et le reboisement au Burkina Faso

- Le GRAD, une ONG et maison d’édition avec pour thématique le développement durable (notamment livres pour enfants)

- Le GREF, GRoupement des Educateurs sans Frontières

Quelques chiffres

Il y a dans le monde 7,4 milliards d’êtres humains et les chiffres les plus récents font état de 7,4 milliards de téléphones mobiles utilisés par 5 milliards de personnes. C’est davantage que les équipements sanitaires de base (douche et toilettes). Parmi ces 7,4 milliards de téléphone, 3 milliards sont des smartphones.

Au Brésil, le temps passé sur les réseaux sociaux est désormais supérieur au temps passé devant la télé.

28% du temps passé sur Internet mondialement concerne Facebook.

7% seulement des informations diffusées sur les réseaux sociaux sont des informations dites « dures », faisant état de fait informatifs nationaux, internationaux, culturels, de sensibilisation…

Discussion

Les usages des réseaux sociaux et applications pour smartphones ont explosé au Sud durant les cinq dernières années menant à des utilisations inattendues et spécifiques à la situation des pays les moins avancés. Trois ont été développées :

- Un système d’information en temps réel sur le cours d’une denrée brute sur les marchés internationales permet au producteur de réclamer un prix juste lors de la vente de son stock, lui évitant d’être floué par des grossistes et intermédiaires peu scrupuleux.

- L’apparition de la cartographie participative permet de lutter contre de nombreux fléaux comme la corruption et tous les types de violence en signalant et géolocalisant les problèmes, permettant selon le cas une intervention de la société civile, un boycott, une protection des victimes.  

- Dans le domaine de la santé, pour les zones reculées où le personnel médical et insuffisant ou insuffisamment formé, les smartphones permettent de transmettre des informations aux médecins, de la simple prise de tension au diagnostic complet, voire à rendre possible, dans des cas extrêmes, une opération chirurgicale à distance.

L’Afrique de l’Ouest notamment utilise désormais le smartphone comme un outil de vie quotidienne ayant remplacé la carte bancaire via le transfert d’argent par SIM, même dans les villages les plus reculés. Cette utilisation, qui a considérablement simplifié la vie des habitants et rendu certaines activités et développements possibles, tout en sécurisant les transferts, posent des problèmes éthiques considérables vis-à-vis des multinationales et notamment d’Orange, dont le but non dissimulé est de faire rentrer les individus les plus pauvres, généralement considérés non solvables, dans le système économique mondial. La surtaxation des transactions financières les plus faibles et les prix élevés des communications ont mené à un boycott de l’opérateur au Mali couronné de succès. La concurrence entre de très nombreux opérateurs (en Afrique, les utilisateurs ont jusqu’à cinq cartes SIM d’opérateurs différents et s’en servent en fonction de la couverture proposée et des promotions tarifaires) permet de maintenir des prix soutenables. Il faut néanmoins considérer avec suspicion que les transactions financières les plus faibles, donc des populations les plus vulnérables, sont toujours taxées à hauteur de jusqu’à 40%, ce qui la maintient dans une précarité extrême. Dans nombre de cas, presque 25% du budget familial est alloué à la communication.

Une alternative émerge toutefois chez les hackeurs et adeptes du hardware libre au Sud : le développement d’une carte SIM libre, qui jouerait le rôle d’antenne et permettrait de se passer d’une dépendance à l’opérateur.

Conclusion

La discussion était très animée entre les intervenants émettant assez peu de réserves sur les smartphones et réseaux sociaux et des participants notamment de l’association ATTAC remettant en cause la totalité de leur discours, inquiets finalement que ces solutions aient un terme très court écologique et social, et ne rendent les populations que plus dépendantes de multinationales qui pillent jusqu’aux plus faibles revenus et dépendantes aussi d’un réseau qui peut extrêmement facilement être détourné, utilisé ou coupé par un régime totalitaire.

A vrai dire, les deux opinions me semblent extrêmement légitimes mais il semble qu’il faille nuancer et surtout ne pas se dresser contre des pratiques qui concernent surtout les peuples du Sud et sur lesquels ces derniers ont un regard beaucoup plus lucide que bien souvent le nôtre. On note en effet que les critiques internes du système, la mise en doute des informations ne citant pas de sources, et les différents types de luttes et d’appels contre les grandes firmes ont une portée très grande notamment en Afrique de l’Ouest. Loin de tout interventionnisme et même si nous avons tous une responsabilité de vigilance vis-à-vis de ce qui arrive à nos frères africains, nous devons je pense respecter leur avancée technologique et les laisser prendre en main leur destin et l’orienter comme ils l’entendront.

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