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Résistance et transition
29 septembre 2014

Quelques mots sur l'écocide ou pourquoi j'ai voulu lire Broswimmer même si ça fait pas plaisir

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Ainsi va l'autruche

J'ai terminé récemment la lecture d'un livre passionnant de Franz Broswimmer intitulé "Ecocide : une brève histoire de l'extinction en masse des espèces". D'aucuns diraient que le titre seulement rebuterait n'importe qui de mettre simplement le nez dedans et que quelqu'un de sensé retournerait lire Le Trône de Fer. Avec tout le respect que je dois à George R. R. Martin, je m'attarderai quand même à vous parler de cette lecture, sinon charmante, du moins nécessaire et instructive. Ceci ne sera ni un résumé, ni une succession de périphrases mais une réflexion sur la base d'un livre qu'en outre je vous conseille vivement.

Je ne suis pas vraiment du genre autruche. Lorsqu'il faut chercher une information déplaisante et en tirer les conclusions qui s'imposent, j'ai tendance à le faire, quitte à ce que ça me complique transitoirement l'existence. C'est pour cela que j'ai voulu en savoir davantage sur la réalité de ce que l'on nomme l'écocide et plus exactement ici l'extinction massive des espèces vivantes animales et végétales, pour raisons anthropiques et ce, depuis le début de toutes les civilisations. L'écocide a, à la base, une étymologie que je trouve fort intéressante. Le "cide" qui signifie tuer, détruire, je pense qu'on l'avait à peu près tous. Mais saviez-vous qu'éco vient de "eikos", la maison ? Là, fatalement, on se dit "Ah ouais, en fait on est en train de faire brûler notre appart' en pleine crise du logement."

L'histoire de l'écocide est longue et douloureuse. Au cours de son expansion, de sa sédentarisation et de son développement, l'humanité a toujours détruit les écosystèmes afin d'étendre sa domination sur toute vie. De nombreuses espèces, notamment de la mégafaune, ont été exterminées car elles menaçaient ou étaient supposées menacer la sécurité d'êtres humains ou leur capacité à se nourrir par leur compétition. Nul ne verra plus de lions de l'Atlas, ni de grand pingouin ou encore d'autruche arabe fouler notre belle planète. Les extinctions se sont cantonnées, jusqu'au XIXe siècle ou presque, à des animaux que l'on chassait pour des motifs utilitaires ou pour se protéger. La perturbation des équilibres des écosystèmes n'en fut pas moins important. Mais c'était sans compter sur la fabuleuse propension de l'homme à vouloir tuer son voisin (par l'intermédiaire de quelqu'un d'autre possédant femme et enfants et n'entendant rien à ces problèmes, de préférence). Les principaux acteurs du réchauffement climatique : les armées. Les principaux acteurs du gaspillage des ressources énergétiques et minières : les armées. Les principaux responsables de la destruction d'écosystèmes entiers pour fragiliser l'adversaire : je vous laisse deviner. Un écologiste est aussi un pacifiste, sans quoi une bonne partie de son raisonnement ne pourra trouver de cohérence.

A la suite des guerres mondiales et des bonds technologiques en découlant, la deuxième partie du XXe siècle a vu un nouveau mode de fonctionnement émerger et se pérenniser, que les sociétés industrialisées ont appelé "le progrès". Il s'agissait d'un mode de fonctionnement basé sur la destruction du vivant, le fait en réalité de s'entourer du "non-vivant" : utilisation de pesticides tueurs, généralisation de l'énergie nucléaire, bétonnage des voies de transport, déforestation massive ... La pollution était née, c'est-à-dire la capacité de l'homme à tuer indirectement, à provoquer l'extinction d'une espèce non pas en la décimant, mais en détruisant son habitat ou en le rendant impropre à la vie. Alors pourtant que l'opinion publique et les changements de mentalités permettent de maintenir les extinctions dues à la chasse excessive à un niveau plus faible qu'auparavant, dès lors, la disparition des espèces s'est accélérée pour atteindre aujourd'hui l'horrifiant chiffre de 25.000 à 30.000 espèces par an (en augmentation).

Pourquoi s'en soucier ?

L'être humain est la seule espèce à pouvoir modifier son environnement de telle sorte de pouvoir, sur une échelle de temps très courte, détruire et reformer des équilibres naturels. Notre capacité à prévoir, changer, empathir et comprendre les interactions complexes de la vie sur terre nous rend responsable de cette même vie, peut-être la seule dans l'univers. L'autoproclamé Homo Sapiens Sapiens, celui qui sait qu'il sait, serait-il Homo Sapiens Abnegationis, celui qui sait mais choisit le déni ? Il ne s'agit pas ici d'aimer la nature mais de comprendre que sans elle, nous ne sommes rien, même si nous arrivions technologiquement à nous en passer (comme le pourrions-nous ?), la nature est tout ce dont nous avons besoin pour être créatif, empathique, curieux, heureux.

Je ne pense pas qu'il n'y ait quoi que ce soit de mystique dans le place de l'homme dans l'univers bien que je respecte ceux qui ont choisi de croire. Quelque soit la vérité, elle tient à peu de choses. Nous tenons à peu de choses. La survie de tout ce que nous aimons dépendra de cette capacité que nous avons à comprendre ce qui est important. Peut-être pas la sortie de l'iPhone 6 et le fait qu'il plie dans la poche, ni le retour de M. S. sur la scène politique.

Car en fait, être écologiste, vegan ou engagé dans n'importe quelle cause, ce n'est pas très facile ni glorieux, un peu comme appartenir à la Garde de Nuit et tenter de prévenir l'arrivée des Marcheurs Blancs tandis que cinq rois se battent pour la gouvernance de Westeros et pour y relancer la croissance (ou pas). Tout est une question de point de vue. Et même si personne ne nous écoute, il faut continuer à le dire.

Le temps que vous lisiez cette article, une espèce vivante animale ou végétale aura disparu définitivement de ce monde. Que ferez-vous PERSONNELLEMENT pour inverser la tendance ?

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  • Ne vous y trompez pas ! Le colibri de la fable ne trie pas ses déchets, il ne prend pas des douches plus courtes, il ne fait pas du covoiturage, il utilise la totalité de son énergie vitale pour éteindre l'incendie dans la forêt qu'il aime. Soyons uni.e.s.
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