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Résistance et transition
22 juillet 2016

Nous sommes l'état de nécessité

A nos élites, le gouvernement, les complexes militaro-industriels qui contrôlent les media, ceux qui décident d’envoyer des soldats français bombarder des positions soi-disant stratégiques et ont tué des centaines de civils, d’hommes, de femmes et d’enfants innocents en Syrie. Ceux qui arment le Moyen-Orient et tous les ennemis des droits humains dans le monde, à hauteur de plusieurs centaines de milliards de dollars par an.
Vous êtes en guerre, pas nous.

Aux lobbyistes qui ont une vision si court-termiste qu’ils acceptent de donner et recevoir près d’un milliard d’euros de pots de vin par an à Bruxelles pour bloquer les lois exigeantes au niveau social ou écologique, rajoutent ces alinéas qui permettent de les contourner, rajoutent ces délais qui laissent tout loisir aux multinationales de continuer les mêmes pratiques « seulement encore quelques années, c’est promis ». A ceux qui négocient TAFTA, CETA, TISA ou les futurs accords de libre-échange avec la Chine.
Vous voulez davantage d’argent, pas nous.

Aux politiques qui ignorent l’opinion publique et légifèrent la libéralisation sauvage, la fin des droits des travailleurs, vendent les services publiques, pillent l’état pour sauver les banques. A ceux qui achètent la paix sociale en subventionnant les éleveurs pour faire oublier que la grande distribution prend une marge brute supérieure au coût de production, ceux qui exonèrent d’impôts les entreprises qui sponsorisent les manifestations sportives et veulent endormir les aspirations collectives de liberté, d’égalité et de fraternité par du pain et des jeux. Ceux qui regardent avec bienveillance l’évasion fiscale et condamnent en justice les lanceurs d’alerte comme Antoine Deltour. Ceux qui n’ont jamais demandé à la grande distribution le paiement des amendes de fraude aux permis de construire des supermarchés, suffisant pour effacer la dette de notre paix.
Vous voulez davantage de pouvoir, pas nous.

Aux media qui aspirent à une guerre civile et qui pour ça sont prêts à faire passer ceux qui luttent contre le néolibéralisme pour des terroristes, qui traitent de casseurs ceux qui ont le malheur de se camoufler le visage pour ne pas être fichés, ne parlent jamais des luttes frontales contre le système et si peu souvent de constructions alternatives, juste un peu pour faire joli et pouvoir se défendre d’être des vendus.
Vous voulez contrôler nos esprits, vous échouez.

A ceux qui ordonnent à la police d’encercler les manifestants, de les charger, de les gazer, sans qu’ils sachent que ces derniers sont nassés et n’ont aucun moyen de se replier ailleurs. A ceux qui déploient des policiers en civil pour tabasser en douce les gens habillés en noir à la sortie des manifs. A ceux qui assignent à résidence sous couvert d’état d’urgence, ont ordonné de bloquer des citoyens engagés dans la Bourse du Travail le 28 juin pour les empêcher d’aller manifester. A ceux qui mandatent des policiers déguisés pour casser et vandaliser des lieux symboliques parce qu’au bout d’une heure, ils n’ont pas réussi à pousser des centaines de « sauvages » encerclés et excédés, à le faire.
Vous voulez nous diviser, vous échouez.

A l’extrême-droite qui se réjouit des morts, des mutilés des attaques contre la France et nourrit un amalgame froid et pervers, s’assit sur le bon sens, scande les mêmes refrains délétères depuis vingt ans, croit qu’elle a gagné en puissance, en crédibilité, en éligibilité, en promettant une sécurité que seule la paix interne, l’amour et la tolérance nous apporteront. Les otages de Daesh disent que les terroristes sont sans arrêt sur les réseaux sociaux pour savoir comment on communique autour de leurs actes et qu’ils sont extrêmement déroutés lorsque l’on diffuse des messages de paix et d’amour pour les communautés musulmanes. Si vous n’avez pas compris ça, Marine et Marion, vous êtes et vous resterez toujours sur la touche.
Vous voulez la peur, nous ne vous la donnerons pas.

A tous ceux-là, ceux qui pensent nous gouverner, nous contrôler, nous garder en état de stase. Vous avez tort. Nous sommes debout, nous sommes libres, nous sommes ingouvernables.

Vous avez perdu.

L’alternatif énergétique, social, agricole, monétaire, fleurit partout. Le peuple a conscience de vos manigances, il ne vous fait plus confiance. Il s’organise. Il fait autrement. Il fait lui-même. Il se parle. Vous avez raillé Nuit Debout, pourtant même si le mouvement lui-même ne rassemble plus autant sur la place de la République et partout en France, les gens désormais se connaissent, ils ont parlé de leurs espoirs, ils se sont comptés.

En manifestation, une foule de plus en plus intelligente et solidaire se construit, capable de s’organiser en street medics, en milice de rue pour protéger les citoyens des charges de police, en media indépendants en première ligne malgré les dangers, en une diversité sublime à faire pâlir le soleil. Pendant que la police gaze les blessés à terre, ces blessés qu’elle est si mauvaise à compter, les manifestants forment des cordons spontanément, les medics soignent. On est loin de ces foules enragées dont on parle sur BFM TV.

Mais c’est dur pour les élites d’avouer qu’elles ont perdu, que ceux qui veulent la chute du système ne sont plus une minorité, que ceux contre lesquels elles luttent ne sont pas une horde informe mais un système stratégique avancé, solidaire et déterminé, qui gagne chaque jour du terrain sur le mensonge institutionnalisé et le terrorisme d’état.

Rendez-vous à la rentrée alors, lorsque ceux qui profitent de leurs congés payés rentreront de vacances avec une gueule de bois au goût de 49.3... J’espère que vous serez prêts.

Car nous, oui. Nous n’oublions pas l’article 35 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 24 juin 1793. Nous sommes debout et libres. Déterminés mais toujours et avant tout pacifiques. La paix seule peut mener à un monde meilleur.

Vous êtes en guerre parce vous agonisez, mais nous, nous ne faisons que naître.

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20 juillet 2016

"Je vis dehors, dedans je meurs"

Damasio-ZoneDehors

Aujourd'hui, je viens de finir le meilleur livre de science-fiction dystopique que j'ai jamais lu et qui est pourtant une oeuvre assez largement inconnue du grand public, La Zone du Dehors d'Alain Damasio.

"Ce livre a été écrit dans un but, unique : comprendre, en Occident, à la fin du vingtième, pourquoi et comment se révolter. Contre qui ? ajouteront certains en guise de prolongement, mais déjà ça glisse, ça devient incertain et flaqué, car la question, que posent ces nouveaux pouvoirs auquel chacun de nous est aujourd'hui confronté, dans son corps, aux tripes même, sans le vouloir, sans s'en dépêtrer, d'où qu'il se tienne, hautain même, indifférent ou narquois, cette question est devenue : contre quoi ?"

L'histoire se situe en 2084, pour le clin d'oeil au roman d'Orwell, et met en scène la civilisation nouvelle d'une élite exilée sur les anneaux de Saturne, alors que la Terre sombre dans le chaos d'une guerre chimique. Dans cette nouvelle démocratie totalitaire où les désirs des citoyens sont provoqués, analysés, normés et où la hiérarchie est définie par le Clastre (un grand examen où chacun est évalué par rapport à son intelligence, sa sociabilité, sa personnalité et ses aptitudes), seule la Volte, un organisme révolutionnaire qui recherche les soubresauts de la vie dans l'aseptie, se débat pour changer les choses. La Volte sans le "ré", c'est "ce qu'il y [a] au creux de [nos] ventres, ce qui bouge encore là-dedans."

"Souriez, vous êtes gérés." Le décor de la trame narrative que je n'entends en rien décrire ici (je vous laisse lire cette fabuleuse histoire), est simplement un prolongement, le plus probable, d'une société de consommation qui irait dans le sens d'une démocratie "juste".

Que voulez-vous citoyen ?

- Plus de confort.      - Plus de sécurité.   - Une hiérarchie où les plus sages et les plus généreux guident.

- Accordé.                  - Accordé.                  - Accordé.

- Plus de temps libre et de loisirs.             

- Accordé.

Aux utopistes, ce livre oppose un réalisme qu'il est difficile de dénier, surtout si le point de départ d'une révolution démocratique se faisait dans le terreau du capitalisme et de la société de consommation, maintenue sur pied par la peur de l'autre et le matérialisme.

Si on demandait leur avis à ceux qui n'ont rien à se reprocher, ils le donneraient. Ils modèleraient l'avenir avec force caméras, puces dans le corps, péages, supermarchés, véhicules individuels et réalité augmentée (comprenez télévision holographique et jeux vidéo immersifs). Voilà le monde idéal pour le citoyen-modèle.

Alors, contre qui on se bat ?

Contre les médias qui normalisent la pensée et les désirs, les transformant en besoin à assouvir immédiatement.

Contre l'éducation, qui au lieu d'élever l'homme, de développer son potentiel créatif et collaboratif, l'enferme dans la peur de l'autre et la compétition.

Contre soi-même.

"Ce qu'il faut faire ? D'abord arrêter de se lamenter et descendre de la croix ! Enlever les clous dans les mains ! Tous les pouvoirs ont intérêt à nous communiquer des sentiments tristes, des sentiments pauvres. A nous de leur opposer un peu de subversion et de joie de vivre."

"POUR QUE VIVE LA VOLTE !"

20 juillet 2016

Le fable du colibri ou comment détourner un conte révolutionnaire pour asseoir l'emprise du capitalisme totalitaire

Un jour, dit la légende, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux terrifiés, atterrés, observaient impuissants le désastre. Seul le petit colibri s’activait, allant chercher quelques gouttes avec son bec pour les jeter sur le feu. Après un moment, le tatou, agacé par cette agitation dérisoire, lui dit : « Colibri ! Tu n’es pas fou ? Ce n’est pas avec ces gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ! »

Et le colibri lui répondit : « Je le sais, mais je fais ma part. »

J'adore cette fable. Ce blog en porte la marque. Mais je ne supporte plus l'explication qu'on en donne et ses conséquences sur la perpétuation d'un certain fatalisme et l'apologie des "petits gestes" de la vie quotidienne. "On va dans le mur, mais j'ai mis ma brique de lait dans la bonne poubelle, ce ne sera pas de ma faute."

Comme un enfant de cinq ans le comprendrait aisément, la fable du colibri n'est pas celle des petits gestes qui changent petit à petit le monde, comme l'interprétation édulcorée et erronée qui en est faite par la doxa majoritaire capitaliste et totalitaire. Le colibri est petit mais il dirige la totalité de son énergie vitale vers un objectif plus élevé que lui-même. Il ne recycle pas trois boîtes de conserve, il ne donne pas dix euros par mois à une association, il ne fait pas une heure de bénévolat par semaine sur son temps libre. Ces gestes perpétuent le système, le nourissent par une déculpabilisation de l'individu et une formidable capacité à projeter de la poudre aux yeux. Or, cette fable ne prône rien de tel. Le colibri est engagé dans une tentative qui l'implique totalement, dans son énergie physique et intellectuelle, vers l'objectif d'éteindre le feu.

La force de travail de l'homme est son principal moyen d'agir sur le monde qui l'entoure, loin devant l'utilisation de son budget ou la gestion de ses déchets, mais la majorité des citoyens, subissant des pressions sociales immenses, ne se l'appropriera jamais plus que très partiellement au cours de sa vie. Pour redresser notre société malade, inhumaine et vouée à la destruction par la raréfaction des ressources non-renouvelables, chaque être humain a le devoir et la nécessité matérielle de disposer de son énergie dans le sens du bien commun, ou au moins, de celui de son bien individuel, ce qui est déjà une avancée formidable.

Il ne peut y avoir de remise en question du paradigme sociétal sans remise en question du travaillisme sur lequel il repose et sur l'utilisation de l'énergie humaine à des fins laborieuses, dans un contexte général. Le système est en effet alimenté par ses membres et si ces derniers décident d'exercer leur plein droit de disposer de leur énergie et de leur temps, ce système s'écroule instantanément. Le mythe selon lequel, si une personne ne remplit pas une fonction, une autre le fera à sa place contribue à confier pour toujours tout pouvoir à une caste de tricheurs. Or, dans le cas d'un boycott général de certaines tâches humainement, socialement et environnementalement destructices, une activité donnée ne serait plus perpétrée puisque les dominants ont besoin de fourmis besogneuses pour maintenir leur emprise.

12 juillet 2016

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12 juillet 2016

UEMSSI 2016 à Besançon : Module sur le néolibéralisme et le libre-échange - Jour 1 - Généralités

Notes prises à l'occasion de l'Université d'Eté des Mouvements Sociaux et de la Solidarité Internationale 2016 du 6 au 9 juillet sur le Campus de la Bouloie à Besançon.

Module « Vers la fin du régime de libre-échange ? Luttes pour démanteler le pouvoir des multinationales et pour un régime commercial au service des droits humains. » - Jour 1/3

Sans réellement d’introduction, les intervenants nous ont immédiatement mis à contribution afin de répondre par groupe d’une dizaine de personnes à trois questions : 1) Comment définir le néolibéralisme en trois mots ? 2) A qui profite le régime de libre-échange ? 3) Quel est le problème posé par ce système commercial ?

Avant de restituer ces discussions, je me propose de redéfinir un peu le néolibéralisme.

Il s’agit de notre régime de commerce actuel, qui succède au capitalisme basique (celui de la révolution industrielle) puis à l’impérialisme (capitalisme au temps des colonies, régime d’accaparements). Le néolibéralisme est donc une strate du capitalisme dans un contexte de grandes inégalités déjà établies entre le Nord et le Sud, les petites entreprises et les multinationales, l’oligarchie et les citoyens. En procédant à la dérégulation totale du commerce, les acteurs économiques dominants, sous couvert de liberté et de libéralisation de tous les aspects de la vie, réalisent une prise de pouvoir total au niveau politique, économique et culturel sur les peuples. L’étape prochaine de ce régime est la systématisation des traités de libre-échange nouvelle génération (de type TAFTA-TTIP sur lequel je reviendrai longuement dans l'article-restitution du deuxième jour du module) via un réseau de proche en proche permettant au marché mondial de ne constituer qu’une seule et même entité profitant seulement aux acteurs déjà dominants, sans considération aucune pour la santé, l’écologie, les droits humains et la démocratie. Le néolibéralisme est en fait un système basé sur un éternel présent au service du seul profit.

1) Comment définir le néolibéralisme en trois mots ? Pour définir le néolibéralisme par trois mots, j’ai proposé un brainstorming. Les mots émergeants de la discussion dans notre groupe furent : Dérégulation, opacité, multinationales, mondialisation, globalisation, compétitivité, accaparement, violences, exploitation, profit, pouvoir, inégalités, croissance, liberté, jungle, injustices. Parmi ceux-ci, nous avons décidé de retenir Globalisation – Compétitivité – Accaparement. Je préférais à ce dernier mot le terme d’Exploitation car il me semblait mettre en exergue le fait d’une utilisation de l’humain comme de la nature mais finalement, nous avons voté pour Accaparement. Chaque mot met en avant un aspect, « Globalisation » la dimension, « Compétitivité » le principe et « Accaparement » la dérive.

2) A qui profite le régime de libre-échange ? Nous avons été rapidement d’accord pour émettre une réponse en trois volets : - les multinationales, - la finance, - l’oligarchie (une élite des acteurs économiques dominants)

3) Quel est le problème posé par ce système commercial ? Le débat a mené à un accord sur le « problème des problèmes », celui dont découlent tous les autres : la privatisation des pouvoirs politiques (les lobbies n’autorisant plus le pouvoir étatique à prendre en compte les volontés populaires par un chantage à la croissance économique et à l’emploi et pesant manifestement sur les décisions géopolitiques et une idéologie d’Etat extractiviste et d’exploitation de l’homme et de la nature). De ce problème-clé découlent les autres : l’augmentation des inégalités, le changement climatique et les déplacements de populations dus aux conflits pour les matières premières.

Historique du capitalisme

Sa naissance remonterait à l’époque charnière entre le Moyen-Âge et la Renaissance mais l’essor véritable de ce dogme n’advient qu’à la fin du XVIIIème siècle. Les 30 glorieuses, après la Deuxième Guerre Mondiale, voient l’apparition de la deuxième phase du capitalisme, l’Impérialisme, où les firmes multinationales commencent à prendre le contrôle des décisions étatiques et assoient leur emprise grâce aux ressources fournies par les colonies des pays industrialisés, maintenant les actuels pays en développement dans un état de servitude (exportation de toutes les richesses vers le Nord, création artificielle et éhontée d’une dette des pays du Sud envers l’Union Européenne et les USA, esclavage visible et non visible, etc). Enfin, l’apparition du néolibéralisme dans les années 70 marque l’entrée dans un capitalisme total et totalitaire mondial qui, par une perte de souveraineté et l’affaiblissement des frontières étatiques, envahit, grâce une culture du spectacle et de la publicité limitant les résistances potentielles, tous les aspects sociaux et interpersonnels de la société, contribuant activement à son démembrement. Il s’agit d’une entreprise de décivilisation par l’intensification des flux déjà existants jusqu’à phagocyter tous les aspects de la vie dans une ultime tentative de maintenir de la croissance (brevetabilité du vivant pour l’accaparement des ressources alimentaires mondiales, capitalisation du service à la personne et des services écosystémiques, …).

Idéologie

L’idéologie néolibérale s’appuie sur le dogme de l’humain en tant qu’homme économique. Selon cette idéologie, l’être humain serait motivé uniquement par l’appât du gain et par son intérêt personnel. Il serait en outre non influencé par son environnement social et culturel (métaphore de « Robinson Crusoé sur son île déserte » souvent invoquée par les néolibéraux). Cette idéologie se veut donc hégémonique ; elle se dit « dans l’ordre des choses » et bénéfique à tous car répondant à la « nature humaine ». Le dogme d’un marché pur et parfait dans ce contexte est entravé par les états dans la volonté de passer du commerce local à un commerce totalement globalisé. Dans cette optique, il est naturel et souhaitable pour les libertés individuelles de dépasser les Etats en détruisant les mesures publiques de régulation du marché (normes, protections et cotisations sociales, principe de précaution, …).

Au-delà de l’intérêt d'apprendre à contenir le réflexe vomitif qu’écrire ce paragraphe m’a immédiatement provoqué, je reste persuadée qu'il est nécessaire de bien connaître un ennemi pour le combattre. L’intérêt de redéfinir le paradigme néolibéral est d’en comprendre conséquemment les contradictions internes afin de pouvoir contrer d’éventuelles argumentations en faveur du système et lui retirer son statut de système naturel alors qu’il s’agit d’un système imposé.

Idée n°1 : L’humain est attiré par l’appât du gain. Alors pourquoi constate-t-on une telle résistance à un système pourtant totalitaire sur le plan culturel et économique ? Pourquoi, si l’humain est-il foncièrement et naturellement égoïste, voit-on partout fleurir l’alternatif, le solidaire, alors même que la majorité silencieuse, si elle n’agit pas et est très mal informée, n’est néanmoins pas exempte de critique envers le système. Ce que l’on constate en fait, c’est que l’humain est déconstruit en homme économique mais que ce n’est pas son état naturel.

Idée n°2 : L’humain n’est pas influencé par son environnement. L’argument le plus facile à déconstruire dans une optique de globalisation où l’humain n’est plus justement que la somme de ses interactions avec le système et les autres humains. Nier le caractère social de l’humain ne s’argumente même pas, il se balaye d’un revers de main et avec grand mépris. Le néolibéralisme s’appuie sur la non-humanité de l’humain.

Idée n°3 : Le pouvoir de l’état doit être annulé pour augmenter les libertés individuelles. Cependant, ce que l’on constate aujourd’hui, c’est au contraire le renforcement du pouvoir étatique, qui est utilisé par les acteurs économiques dominants à leur profit en lui appliquant le vocabulaire de l’entreprise et en l’utilisant comme milice de son hégémonie d’où une militarisation de la police (très visible en France depuis la mise en place de l’Etat d’urgence en novembre 2015). Le dogme néolibéral utilise cet adage : « La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres. » Pour les citoyens, il est devenu clair que « La liberté des uns s’arrête là où s’arrête aussi celle des autres. »  d’où une convergence des luttes de plus en plus visible.

Idée n°4 : Le néolibéralisme met tous les individus sur le même plan et lui autorise les mêmes chances. Bien entendu, cet argument ne tiendrait que dans un système libre et non faussé, loin du nôtre. Les rapports de force existants se renforcent lorsque les protections légales des plus faibles acteurs sont supprimées. On voit que la libre circulation des capitaux peut se faire dans les deux sens mais que la libre circulation des personnes est de plus en plus contrainte dans le sens Sud-Nord. Les Etats-Unis, à la fois très libéraux et protectionnistes, sont un exemple très parlant de politique impérialiste extrêmement unilatérale.

Contexte actuel

Aujourd’hui, de nouveaux outils s’offrent aux néolibéraux pour étendre l’emprise du système et donc de la « crise » qui est le mode de fonctionnement normal du capitalisme (les trente glorieuses ayant été une parenthèse, pas si glorieuse que cela par ailleurs). La strate néolibérale du capitalisme, qui n’est pas vraiment une nouvelle étape mais un fonctionnement parallèle supérieur de celui-ci, tend à augmenter la financiarisation de l’économie (spéculation et économie non basée sur les ressources), la numérisation des systèmes de production, la dérégulation et l’uniformisation au sein des états, la délocalisation pour davantage de polarisation (Asie – Pôle industriel, Afrique et Moyen-Orient – Pôle Matières premières, USA/UE – Pôle financier), ainsi que l’extension au secteur du vivant (biotechnologies et brevetage du vivant).

Un aspect cependant favorise tous les autres : la dérégulation par l’établissement de traités internationaux de libre-échange qui sont en fait des accords internes au sein des lobbies mais prenant la forme d’accords entre deux états ou groupes d’états. Ces traités dits bilatéraux, comme TAFTA entre l’UE et les USA, tentent de prendre un contrôle total sur les lois de régulation du marché déjà existantes (et en amont sur les projets de loi) par la création de la Coopération Réglementaire. Cet organisme transnational, s’il voit le jour, permettra aux multinationales de s’arroger le droit d’exercer une pression économique et financière sur les états ayant, en vigueur ou en étude de projet, des lois qui entravent ou entraveraient, selon la coopération réglementaire, le libre-échange qui est, toujours selon le dogme, dans l’intérêt des populations.

Ces traités ont également pour but d’être des moyens de pression pour la signature d’autres traités interconnectés et donc pour la création d’une grande toile commerciale, permettant au Nord de garder sa sphère d’influence sur d’anciennes colonies ou états fusionnés (ex-URSS) diminuant ainsi les gaps entre les différentes actions antidémocratiques prises par les états et les entreprises pour annihiler la résistance citoyenne et augmenter le pouvoir des lobbies et des multinationales.

L’opacité et l’anonymat de l’oligarchie, désormais avérés, est un outil redoutable qui a permis de passer du patronat identifiable à une caste d’actionnaires et de financiers dont la responsabilité au niveau social et écologique ne peut plus être mise en cause de façon simple.     

En gros, c’est la merde.

Que répondre si on nous dit : « Il faut signer TAFTA ! Les Chinois vont nous manger sinon ! » ?

Premier argument : Les multinationales soi-disant françaises ou européennes ne le sont en fait pas. Il n’y a pas de nationalité des transnationales car elles sont déterminées par un actionnariat qui est ouvert au monde entier, dont le seul but est le profit, pas des considérations nationalistes.

Deuxième argument : Abaisser les normes en général, c’est permettre aux produits américains, mais aussi chinois par conséquent, d’être plus compétitifs sur notre marché qui, pour l’instant, est relativement normatif.

Troisième argument : Euh, ben en fait, on est aussi en train de signer un truc avec les Chinois alors bon…

Quatrième argument : Sur l’investissement qui est le cheval de bataille des néolibéraux, l’expérience et l’histoire doivent parler. L’argent ne va pas forcément dans les pays qui sont les moins régulés. Le continent africain ne représente que 10% des investissements mondiaux, pour preuve.

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12 juillet 2016

UEMSSI 2016 à Besançon : Atelier 1 - Smartphones au Sud

Notes prises à l'occasion de l'Université d'Eté des Mouvements Sociaux et de la Solidarité Internationale 2016 du 6 au 9 juillet sur le Campus de la Bouloie à Besançon.

Atelier « Smartphones et médias sociaux au Sud, des révolutions en cours… au service d’autres développements ? »

Je me suis rendue à cet atelier un peu par provocation étant donné ma critique ouverte vis-à-vis des smartphones, du coût social et environnemental de leur fabrication, du caractère immensément transitoire de cette technologie qui n’est pas soutenable d’un point de vue des matières premières, et de toutes les dépendances associées (dépendance à la technologie elle-même, aux multinationales qui la produisent) ainsi que le problème de la gestion et de l’utilisation commerciale des données récoltées sur les consommateurs. Néanmoins, je sais aussi que les smartphones rendent actuellement, notamment en Afrique, des services considérables au niveau social, sanitaire et économique, qu’il est difficile de dénier. Il me semblait donc pertinent de me renseigner sur cette problématique et de mettre un peu d’eau dans mon vin au contact de personnes ayant une opinion radicalement opposée, ce qui est toujours enrichissant.

Les intervenants de l’atelier faisaient partie de quatre associations utilisant les réseaux sociaux pour sensibiliser à leurs problématiques, notamment :

- l’OADEL, ONG sensibilisant à la consommation de produits locaux plutôt qu’importés et à la nutrition de bonne qualité en général au Togo

- Pour un Autre Monde, autre ONG œuvrant auprès des étudiants pour limiter l’exode rural en sensibilisant pour la restauration des terres dégradées via la permaculture et le reboisement au Burkina Faso

- Le GRAD, une ONG et maison d’édition avec pour thématique le développement durable (notamment livres pour enfants)

- Le GREF, GRoupement des Educateurs sans Frontières

Quelques chiffres

Il y a dans le monde 7,4 milliards d’êtres humains et les chiffres les plus récents font état de 7,4 milliards de téléphones mobiles utilisés par 5 milliards de personnes. C’est davantage que les équipements sanitaires de base (douche et toilettes). Parmi ces 7,4 milliards de téléphone, 3 milliards sont des smartphones.

Au Brésil, le temps passé sur les réseaux sociaux est désormais supérieur au temps passé devant la télé.

28% du temps passé sur Internet mondialement concerne Facebook.

7% seulement des informations diffusées sur les réseaux sociaux sont des informations dites « dures », faisant état de fait informatifs nationaux, internationaux, culturels, de sensibilisation…

Discussion

Les usages des réseaux sociaux et applications pour smartphones ont explosé au Sud durant les cinq dernières années menant à des utilisations inattendues et spécifiques à la situation des pays les moins avancés. Trois ont été développées :

- Un système d’information en temps réel sur le cours d’une denrée brute sur les marchés internationales permet au producteur de réclamer un prix juste lors de la vente de son stock, lui évitant d’être floué par des grossistes et intermédiaires peu scrupuleux.

- L’apparition de la cartographie participative permet de lutter contre de nombreux fléaux comme la corruption et tous les types de violence en signalant et géolocalisant les problèmes, permettant selon le cas une intervention de la société civile, un boycott, une protection des victimes.  

- Dans le domaine de la santé, pour les zones reculées où le personnel médical et insuffisant ou insuffisamment formé, les smartphones permettent de transmettre des informations aux médecins, de la simple prise de tension au diagnostic complet, voire à rendre possible, dans des cas extrêmes, une opération chirurgicale à distance.

L’Afrique de l’Ouest notamment utilise désormais le smartphone comme un outil de vie quotidienne ayant remplacé la carte bancaire via le transfert d’argent par SIM, même dans les villages les plus reculés. Cette utilisation, qui a considérablement simplifié la vie des habitants et rendu certaines activités et développements possibles, tout en sécurisant les transferts, posent des problèmes éthiques considérables vis-à-vis des multinationales et notamment d’Orange, dont le but non dissimulé est de faire rentrer les individus les plus pauvres, généralement considérés non solvables, dans le système économique mondial. La surtaxation des transactions financières les plus faibles et les prix élevés des communications ont mené à un boycott de l’opérateur au Mali couronné de succès. La concurrence entre de très nombreux opérateurs (en Afrique, les utilisateurs ont jusqu’à cinq cartes SIM d’opérateurs différents et s’en servent en fonction de la couverture proposée et des promotions tarifaires) permet de maintenir des prix soutenables. Il faut néanmoins considérer avec suspicion que les transactions financières les plus faibles, donc des populations les plus vulnérables, sont toujours taxées à hauteur de jusqu’à 40%, ce qui la maintient dans une précarité extrême. Dans nombre de cas, presque 25% du budget familial est alloué à la communication.

Une alternative émerge toutefois chez les hackeurs et adeptes du hardware libre au Sud : le développement d’une carte SIM libre, qui jouerait le rôle d’antenne et permettrait de se passer d’une dépendance à l’opérateur.

Conclusion

La discussion était très animée entre les intervenants émettant assez peu de réserves sur les smartphones et réseaux sociaux et des participants notamment de l’association ATTAC remettant en cause la totalité de leur discours, inquiets finalement que ces solutions aient un terme très court écologique et social, et ne rendent les populations que plus dépendantes de multinationales qui pillent jusqu’aux plus faibles revenus et dépendantes aussi d’un réseau qui peut extrêmement facilement être détourné, utilisé ou coupé par un régime totalitaire.

A vrai dire, les deux opinions me semblent extrêmement légitimes mais il semble qu’il faille nuancer et surtout ne pas se dresser contre des pratiques qui concernent surtout les peuples du Sud et sur lesquels ces derniers ont un regard beaucoup plus lucide que bien souvent le nôtre. On note en effet que les critiques internes du système, la mise en doute des informations ne citant pas de sources, et les différents types de luttes et d’appels contre les grandes firmes ont une portée très grande notamment en Afrique de l’Ouest. Loin de tout interventionnisme et même si nous avons tous une responsabilité de vigilance vis-à-vis de ce qui arrive à nos frères africains, nous devons je pense respecter leur avancée technologique et les laisser prendre en main leur destin et l’orienter comme ils l’entendront.

12 juillet 2016

UEMSSI 2016 à Besançon : Conférence plénière sur les nouveaux mouvements sociaux

Notes prises à l'occasion de l'Université d'Eté des Mouvements Sociaux et de la Solidarité Internationale 2016 du 6 au 9 juillet sur le Campus de la Bouloie à Besançon.

Conférence plénière : « Reprendre la main sur nos vies : stratégies et outils des mouvements sociaux »

Une conférence articulée autour d’interventions sur les thématiques : les mouvements sociaux en Espagne depuis le 15M ; la Nuit Debout et les perspectives de mouvements lors de la présidentielles de 2017 ; l’affaire Luxleaks.

Le Mouvement des Indignés ou mouvement du 15M est né en Espagne à la Puerta del Sol de Madrid le 15 mai 2011 et a apporté des perspectives nouvelles aux mouvements sociaux mondiaux en créant une dynamique non-violente et transnationale avec des perspectives, des modes d’action et des revendications inédites. Ce mouvement populaire qui continue encore aujourd’hui s’est traduit par deux conséquences différentes, deux hypothèses :

- L’hypothèse Podemos a mené à la création du parti politique du même nom qui a obtenu des sièges à l’assemblée par la mise en œuvre d’une politique classique basée sur la présentation d’un leader, d’une communication large utilisant les media dominants et d’un programme utilisant des « contenants vides » (grands concepts sans programme concret). Le succès de l’hypothèse Podemos, quoique mitigé par ailleurs, est réel aujourd’hui.

- L’hypothèse mouvementiste est le refus de la politisation du mouvement par des moyens classiques et la recherche d’une déconstruction de la politique telle qu’elle se présente en république, représentative et finalement peu démocratique. La représentation du mouvement par un leader n’est néanmoins pas exclue de ce modèle. De nombreuses victoires ont été obtenues dans les mairies par des candidats qui se réclament du peuple à Madrid, Barcelone, Valence, Cadiz et d’autres parmi les plus grandes villes d’Espagne.

On pourrait imaginer qu’étant donné les victoires obtenues par le 15M sur les deux fronts, nous soyons les témoins d’une révolution complète de la politique espagnole. Le problème, tout comme en France et dans d’autres pays, est un blocage étatique qui semble insurmontable. La politique étatique est en effet totalement influencée par la sphère économique mondiale et par la politique globalisée de l’Union Européenne.

Quelles solutions proposées ? Nous sommes tous je pense sceptique devant la possibilité d’une révolution horizontale mais les soulèvements populaires récents donnent une grande confiance dans le changement individuel et le changement de nature profonde des mouvements sociaux qui devront miser sur le nombre d’individus impliqués afin de déborder le politique et de s’imposer dans le débat public au plus haut niveau (notamment à Bruxelles).

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En France, la Loi Travail ou Loi El-Khomri cristallise toutes les trahisons subies et accumulées depuis le début du quinquennat de François Hollande. Les citoyens se sentent dépossédés de la démocratie, savent ne plus être écoutés du tout par le gouvernement qui légifère sans l'avis populaire.

La « Nuit Debout » est née le 31 mars 2016 à l’issue d’une manifestation contre le projet de loi où des citoyens ont créé l’émulation nécessaire à leur propre dépassement pour que le peuple s’approprie le concept. Il est intéressant de constater que ceux qui ont inspiré le mouvement en ont perdu la maîtrise avant même son avènement concret. Le mouvement s’est construit autour d’une liberté d’initiatives (démocratie réelle) et l’expérience commune des violences policières, du mépris des partis et medias conventionnels, de la reprise de l’espace public et du dépassement de l’impuissance imposée par le système.

La place de la République est ainsi devenue un lieu de convergences qui a permis de sortir de l’entre-soi des mouvements sociaux classiques pour aller vers la majorité (l’hégémonie culturelle) et croire que c’est possible !

La légitimité du mouvement et de la désobéissance civile associée à l’occupation des places s’inscrit dans « l’état de nécessité » qui donne constitutionnellement le droit au peuple d’aller contre une loi pour un objectif plus élevé : face à la question climatique, face aux inégalités, face aux violences d’état.

Actuellement et cet été, le mouvement Nuit Debout doit fixer des objectifs et des échéances pour s’emparer du débat public lors de la présidentielle de 2017 et, ni plus ni moins, l’empêcher de se dérouler de façon classique.

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Antoine Deltour, lanceur d’alerte, est brièvement intervenu sur l’affaire Luxleaks dans laquelle il a dévoilé des documents officialisant les accords entre des multinationales et son cabinet d’expertise comptable dans le cadre d’une évasion fiscale absolument massive au Luxembourg. Récemment condamné à un an de prison avec sursis et 1.500€ d’amende, il a décidé de faire appel malgré la peine avec sursis et la somme qui lui est demandée et qui est, dit-il, dérisoire comparée aux frais d’avocats, afin de réclamer une décision juste et la reconnaissance que son action, bien qu’illégale car violant le secret des affaires, était menée dans l’intérêt général.

 

12 juillet 2016

UEMSSI 2016 à Besançon : Module sur le néolibéralisme et le libre-échange - Jour 2 - Les traités de libre-échange

Notes prises à l'occasion de l'Université d'Eté des Mouvements Sociaux et de la Solidarité Internationale 2016 du 6 au 9 juillet sur le Campus de la Bouloie à Besançon.

Module « Vers la fin du régime de libre-échange ? Luttes pour démanteler le pouvoir des multinationales et pour un régime commercial au service des droits humains. » - Jour 2/3

Le TAFTA

Le Transatlantic Free Trade Agreement (TAFTA) ou Transatlantic Trade and Investment Partnership (TTIP) ou encore Traité transatlantique de libre-échange est un traité en négociation depuis juillet 2013 entre les USA et l’Union Européenne. Ces négociations, malgré leur grande opacité, ont acquis une visibilité à cause de la législation états-unienne peu exigeante et de la mauvaise réputation des multinationales américaines. Les lobbies industriels ont un accès privilégié au processus de négociation de ce traité. Le parlement européen n’a aucun pouvoir dans celle-ci, il est seulement « débriefé » après les réunions du comité de rédaction.

Le TAFTA apporte des nouveautés par rapport aux accords de libre-échange existants entre les pays industrialisées : il ne parle plus seulement des accords de commerce (simple échange de biens et de services) ; il propose un cadre législatif et juridique pour minimiser les entraves au libre-échange (réorganiser et harmoniser les dispositifs institutionnels « subjectifs » des états) via deux organismes : l’ISDS (tribunal des multinationales) et la Coopération réglementaire. Néanmoins, ces dispositifs ne sont pas une nouveauté dans le commerce international. Ces systèmes existent déjà entre l’Europe et leurs anciennes colonies et furent institutionnalisés la première fois il y a 60 ans par l’Allemagne dans le cadre d’un accord avec le Pakistan.

La Coopération réglementaire est un organisme indépendant des états qui peut être saisi par les entreprises pour harmoniser les lois et les normes au niveau environnemental, de la santé et des pratiques sociales par exemple au sujet des OGM, des pesticides, des hormones, de la législation du travail, des protections sociales des citoyens, etc. Le principe de précaution n’existe pas pour cette institution. Selon le TAFTA, « la science industrielle est plus objective que la science d’état qui est politisée ». L’argumentaire pour la dérégulation est que si l’on ne protège pas les investisseurs, ils ne viendront pas. Il n’existe pourtant aucun rapport entre ce dispositif déjà existant ailleurs et la géographie de l’investissement, encore moins avec l’emploi et la création de richesses, ce que je vais développer plus loin avec les conséquences de l’ALENA qui est en vigueur depuis plus de 20 ans en Amérique du Nord.

L’ISDS est un dispositif juridique mis en place pour permettre aux transnationales d’attaquer en justice les états et de leur demander des pénalités financières s’ils refusent de modifier leur législation. Le retrait de la loi ne peut être imposé mais ce système reste très dissuasif, surtout pour les états fragiles. Il s’agit d’outiller et d’armer les multinationales en faisant passer les intérêts privés pour l’intérêt général. Ce dispositif juridique qui existe déjà dans le cadre de traités entre pays industrialisés et pays en développement (souvent entre anciens colons et colonies) a très peu évolué depuis les années 50, l’arbitrage étant toutefois devenu une industrie : les ISDS démarchent désormais les sociétés multinationales pour qu’elles attaquent les états et réclament leur part du gâteau (depuis le milieu des années 90).

L’ALENA

ALENA signifie Accord de Libre-Echange Nord Américain. Il peut également être désigné par le terme NAFTA en anglais (Nord American Free Trade Agreement) ou TLCAN en espagnol (Tratado de Libre Comercio de América del Norte). Cet accord fut signé en 1994 entre un pays émergeant, le Mexique, et les deux pays industrialisés que sont les USA et le Canada. Il ne s’agissait pas forcément du premier du genre mais nous disposons désormais d’un recul de plus de vingt ans pour mesurer les conséquences de sa signature. Un accord existait préalablement entre Canada et USA donc c’est surtout sur les conséquences pour l’économie mexicaine que nous nous attarderons.

Quels furent les arguments invoqués pour la mise en place de l’ALENA ?

Du point de vue mexicain : La promesse de l’ALENA était avant tout un développement de l’économie mexicaine qui allait ainsi devenir un fournisseur privilégié des Etats-Unis et inversement ce qui, pour le Mexique lui-même, devait signifier une augmentation de la qualité des produits qu’il importait. De façon général, l’ALENA devait créer massivement des emplois et contribuer à une hausse de la qualité de vie au Mexique jusqu’à s’aligner sur le niveau de vie des USA.

Du point de vue des USA : L’horizon ALENA devait permettre une augmentation de la sécurité de la frontière Mexique-USA (frontière la plus traversée du Monde) par une stabilisation de l’économie du Mexique, donc une stabilisation des mouvements migratoires. Pour les USA, c’était s’assurer une sécurisation de l’importation d’énergie, le Mexique étant à l’époque le cinquième producteur mondial de pétrole. Enfin, il s’agissait de rééquilibrer la balance économique des USA et redonner de la compétitivité à leur économie pour faire face à l’UE et au Japon.

Le très controversé chapitre 11 a permis de créer un dispositif d’attaque d’un état en justice par une société qui s’estime flouée par la législation, un changement de régime (concept d’expropriation indirecte), etc.

Qu’est-ce que l’expropriation indirecte ?

Exemple : En 1980, suite à la révolution iranienne, les USA considèrent avoir été dépossédés de leur possibilité de faire du profit dans le pays. Ils s’estiment expropriés indirectement. Des multinationales américaines implantées en Iran décident d’attaquer grâce à un accord de libre-échange en vigueur le gouvernement iranien et gagnent des dommages et intérêts.

Le chapitre 11 officialise un nouvel aspect du capitalisme néolibéral : l’investissement n’est plus une prise de risque. Le capital n’accepte plus la possibilité de perdre.

Quelles conclusions après 20 ans d’ALENA ?

Les échanges commerciaux depuis 1994 ont été multipliés par 8 pour atteindre le chiffre d’un milliard de dollar par jour entre les USA et le Mexique.

On estime que 60.000 emplois sont créés par an au Mexique grâce à l’ALENA, ce qui, au regard de la population de 125 millions d’habitants est absolument négligeable alors qu’aux USA, un tiers des emplois industriels ont été délocalisés. Les salaires dans le secteur industriel au Mexique a seulement suivi la courbe de l’inflation passant de 2,21$/h à 2,79$ tandis qu’aux USA on est passé de 14,33$/h à 16,98$. Le gap entre le niveau de vie au Mexique et aux USA n’a absolument pas diminué.

De plus, l’agriculture au Mexique est en crise grave à cause de la compétitivité de l’agriculture américaine (haute productivité et larges subventions). 4 millions d’emplois agricoles ont été perdus en 20 ans au Mexique. Avant l’ALENA, le Mexique était autosuffisant en denrées alimentaires de base (maïs et haricots rouges) et en était même exportateur. Aujourd’hui, il est importateur net de nourriture. La majorité des petites exploitations a disparu. Le changement de régime alimentaire passant de la canne à sucre au sirop de maïs américain a propulsé le pays au premier rang mondial en termes d’obésité.

La stabilisation des flux migratoires n’a pas eu lieu. Alors qu’il y avait 4 millions de Mexicains aux USA en 1994, il y en a aujourd’hui 12 millions avec pour conséquence sociale un nombre incalculable de familles éclatées. Pour preuve, le Mexique est au quatrième rang mondial de l’envoi d’argent aux familles depuis l’étranger. Beaucoup de violences aujourd’hui perdurent avec 600.000 personnes par an qui tentent de traverser la frontière vers les USA. La moitié de la population est classé sous le seuil de pauvreté. Il y a eu une explosion du marché informel (vente à la sauvette, petits boulots « au noir ») donc sans protection social et sans cotisations pour les fonds publics.

Grâce au fabuleux chapitre 11, le Mexique a été attaqué par des multinationales américaines et canadiennes à de très nombreuses reprises. Notamment en 2003 avec les affaires METALCAD, TECMED et AVANGOA qui sont des entreprises de déchets toxiques ultimes (non traitables) qui souhaitaient implanter leur « poubelle » au Mexique. La résistance citoyenne locale ayant été forte, elles n’ont pas pu le faire mais ont été « dédommagées » d’un montant de 125 millions de $ par l’état mexicain.  D’autres désastres écologiques ont néanmoins eu lieu avec l’explosion des concessions minières (principalement or et argent) au Mexique qui couvrent désormais 15% du territoire national, soit une surface équivalente à celle de l’Italie. Le bétonnage massif des côtes pour le tourisme, outre les conséquences sur les inondations et la destruction des habitats, a mené à de grands mouvements de populations débouchant évidemment sur une instabilité sociale croissante.

Après 20 ans, on peut dire que tous les objectifs sociaux ont complètement échoués et que l’ALENA a sensiblement facilité et accéléré les effets de la crise économique sur la population mexicaine en détruisant son agriculture locale, son environnement et en permettant aux multinationales de voler l’argent public.

L’ALENA aura des conséquences directes sur l’UE en cas de signature du CETA (accord entre UE et Canada) et ce, même si TAFTA échoue car les accords de libre-échange fonctionnent de proche en proche. La Chine étant partenaire de ses pays, elle reconfigure déjà de toute façon la législation internationale de façon indirecte.

Les APE

Les APE pour Accords de Partenariat Economique sont des traités de libre-échange en pourparler depuis le début des années 2000 entre l’Union Européenne et trois groupements de pays africains (l’Afrique de l’Ouest, l’Afrique de l’Est et l’Afrique du Sud). Ces discussions très conflictuelles ont mis de très nombreuses années à déboucher sur la rédaction de textes en raison de la posture extrêmement agressive de l’Union Européenne dans les négociations, qui sont en fait un chantage total des pays européens sur leurs anciennes colonies. Le reste de mon exposé sera centré sur les APE avec l’Afrique de l’Ouest.

Jusqu’à 2002, des accords existants privilégiaient les pays en développement en leur permettant d’exporter en UE sans droits de douane alors que ces pays pouvaient taxer à l’inverse les pays européens à l’import. L’OMC a rendu illégal ses accords (!) ce qui a perdu d’ouvrir une brèche pour que l’UE renégocie toutes les conditions d’échange avec l’Afrique de l’Ouest. Les PMA notamment (pays les moins avancés) bénéficiaient de l’initiative internationale « Tout sauf les armes » qui encourageait la croissance des pays les plus pauvres en leur accordant un accès privilégié au marché européen. Devant ce « traitement de faveur », l’UE a souhaité faire signer aux non-PMA (telle la Côte d’Ivoire) des APE intermédiaires afin de mettre en concurrence tous les états de la zone, y compris ceux, plus industrialisés, où de nombreuses multinationales européennes sont implantées, et ainsi déstabiliser les constructions régionales et le commerce entre les pays d’Afrique de l’Ouest, presque tous PMA.

Les APE dans la zone Afrique de l’Ouest ne concernent pas les échanges de services mais seulement de biens. Ils imposent la suppression des droits de douane sur 75% des denrées à l’import. On estime pourtant que seulement 6% de la production africaine de l’Ouest est compétitive avec la production européenne (en raison d’une agro-industrie européenne excédentaire et massivement subventionnée par la Politique Agricole Commune) et que cette compétitivité n’est possible que pour la production industrielle et non pas l’agriculture locale vivrière et durable. La filière laitière en particulier sera condamnée par ces mesures car le secteur laitier en Afrique de l’Ouest n’est pas compétitif avec une Europe de l’élevage laitier intensif et excédentaire.

Cela signifie également une perte massive de revenus de douane donc moins de services publics et d’investissement dans l’industrie agro-alimentaire locale. Pour la zone, les pertes estimées s’élèveront à environ 2 Milliards d’Euros par an en 2030 selon un calendrier de libéralisation progressif imposé. Plus aucune marge de manœuvre douanière pour les pays africains ne sera envisageable en cas de fragilisation économique extrême (conséquence attendue). Le détournement des échanges locaux au profit de l’UE signera l’arrêt de mort de l’agriculture traditionnelle, une augmentation exponentielle des intrants chimiques et donc de la dépendance aux multinationales de l’UE, et une victoire annoncée des acteurs économiques déjà dominants et compétitifs en Afrique de l’Ouest (souvent transnationaux).

La négociation des accords se fait en trois temps : le paraphe (écriture du texte), la signature des pays concernés et enfin la ratification par les parlements nationaux qui est une phase longue car elle nécessite le débat parlementaire. L’UE étant impatiente de nouer ces accords a posé un ultimatum aux pays africains concernés à l’échéance du 1er octobre 2016. Les droits de douane pour l’Afrique de l’Ouest, si l’accord n’est pas ratifié à cette date, se verront augmentés à l’import en UE. Cette mesure illégitime, ne tenant pas compte des délais nécessaires dans ces pays à démocratie fragile pour discuter d’un texte d’une telle portée, a été ostensiblement prise pour couper le débat parlementaire. L’OMC, qui devrait jouer ici un rôle de régulation, montre son impuissance face aux acteurs économiques dominants. L’UE joue ici un double jeu car elle devra payer le coût de cette folie ; les dépenses en aide d’urgence et aide au développement risquent d’exploser. Il faudra réparer d’une main ce que l’on a détruit de l’autre. La logique néolibérale sous-jacente apparaît ici au grand jour : socialiser les coûts et privatiser les bénéfices.

Une pétition existe sur internet pour interpeler les eurodéputés sur la question des APE ici

Conclusion

Les traités de libre-échange sont un grand frein au changement systémique souhaitable tant au niveau de la transition économique que de la transition écologique, qui s’en trouvent entravées par l’abaissement des normes, l’accaparement des moyens de légiférer dans l’avenir, et par la mise en place de l’ISDS (tribunal d’arbitrage lobbies-états). Nous nous retrouvons devant une dichotomie simple : les multinationales contre la souveraineté des peuples. La transition devra donc se faire au niveau local (hors système), tout en continuant la lutte intra-système contre la mise en place de nouveaux traités.

12 juillet 2016

UEMSSI 2016 à Besançon : Conférence plénière sur le fonctionnement du « néolibéralisme de crise »

Notes prises à l'occasion de l'Université d'Eté des Mouvements Sociaux et de la Solidarité Internationale 2016 du 6 au 9 juillet sur le Campus de la Bouloie à Besançon.

Conférence plénière : « De quoi la ‘’crise’’ est-elle le nom ? » présentée par Dominique Plihon, avec Geneviève Azam et Jean-Marie Harribey

La notion de « crise », utilisée pour définir la période économique que nous traversons, résulte d’une difficulté croissante à penser la situation telle qu’elle se présente à nous : la menace de notre seul habitat possible, la menace aussi de l’impossibilité de l’alternative, de notre espérance en un autre monde.

Par définition, la « crise » est un moment anormal/instable entre deux périodes normales/stables. Hors, cette instabilité perdure et s’installe, devenant stable et normale. Historiquement, pour sortir d’une crise, le capitalisme a dû intégrer un élément hors capital, extérieur. Mais désormais, même la nature est intégrée au capital par le biais de la financiarisation des services écosystémiques. Le fait qu’il n’existe plus d’extériorité au capital fait que pour pouvoir continuer à exister, il doit non plus intégrer de nouveaux éléments mais renforcer ceux qui existent par l’intensification des flux et l’accélération des échanges. Aujourd’hui, on sait que le libre-échange et internet n’ont néanmoins pas permis une propulsion de la société aux niveaux économiques et sociaux promis et attendus. Pourtant, les gouvernements ne prennent pas la mesure de cette stagnation dont on ne peut sortir car elle est systémique.

Depuis les années 2000, on n’assiste plus à des crises successives mais à une crise unique et internationale. Pour preuve, la dette chinoise a été multipliée par quatre en dix ans. Il n’y a plus de zone épargnée par le sinistre. On ne peut ainsi plus parler de « crise » mais d’effondrement, d’essoufflement du modèle, et ce, depuis les années 70. Cela ne signifie pas néanmoins qu’il s’affaiblit. En 1971, le Club de Rome lançait son alerte sur l’impossibilité d’une croissance infinie et les années 70 ont vu un fort mouvement de contestation mondiale vers l’autonomie. Les gouvernements ont traduits ces aspirations libertaires en programmes électoraux néolibéraux et la promesse du retour à la situation des 30 Glorieuses.

On s’aperçoit aujourd’hui que la « crise » est le moyen-même de la régulation du modèle. Le capitalisme, fragilisé par ses incohérences, doit se justifier par l’emploi de mesures extrêmes pour le bien commun. Selon la théorie capitaliste, le marché est nécessaire et on doit le sauver par tous les moyens car sans le marché, la société n’existe pas, elle n’est qu’un réseau mouvant et instable que le marché stabilise. Il FAIT la société.

La vertu que revêt actuellement la question écologique est de permettre de contraindre le système et le mettre devant des limites non-négociables, à l’opposé de son obsession pour l’accélération, de son extractivisme des ressources naturelles et du travail via la flexibilité extrême, le mouvement permanent. A ces valeurs, la société civile et le tissu associatif alternatif oppose désormais la lenteur, la décroissance, la relocalisation, les communs, la réduction du temps de travail pour une redistribution de l’activité, les basses technologies, autant de passerelles vers un nouveau paradigme de société avec le cassage du système bancaire dominant, l’annulation des dettes illégitimes et la mise en place d’alternatives monétaires locales. Un modèle se construit déjà en parallèle car le système actuel ne pourra pas tomber brusquement, son agonie sera interminable et signifierait la fin de toute vie.

Il s’agit désormais pour les néolibéraux de mettre en place un projet de décivilisation et de destruction massive grâce au levier de la terreur. Utiliser le mot « crise », c’est jouer leur jeu en permettant de croire qu’il existe une sortie par l’accumulation. La culture de la peur est largement utilisée pour justifier les mesures d’urgence, la course à l’armement, les violences policières et une lutte antiterroriste complètement inadaptée et dangereuse pour la sécurité et l’intégrité nationale.

12 juillet 2016

UEMSSI 2016 à Besançon : Module sur le néolibéralisme et le libre-échange - Jour 3 – Les alternatives au libre-échange

Notes prises à l'occasion de l'Université d'Eté des Mouvements Sociaux et de la Solidarité Internationale 2016 du 6 au 9 juillet sur le Campus de la Bouloie à Besançon.

Module « Vers la fin du régime de libre-échange ? Luttes pour démanteler le pouvoir des multinationales et pour un régime commercial au service des droits humains. » - Jour 3/3 - Les outils alternatifs pour un régime commercial respectueux des droits humains

Le commerce équitable : l’exemple d’Artisans du Monde

Fondée vers 1970, cette ONG de solidarité internationale altermondialiste, membre fondateur d’ATTAC, prône un commerce respectueux des droits de l’homme. A la base, il s’agit d’une fusion de plusieurs associations françaises qui réalisaient du commerce équitable avec le Bangladesh en solidarité à la suite d’une catastrophe naturelle. L’activité d’Artisans du Monde démarre avec la rédaction d’une charte qui cadre les valeurs démocratiques mises en pratique dans le réseau.

Le commerce équitable se base sur un rapport d’égal à égal entre les acteurs et un engagement dans la durée des deux parties. Néanmoins, il ne doit pas être le seul interlocuteur/client des associations de producteurs. La plupart du temps, les coopératives au Sud vendent une partie de leur production dans les filières classiques et une autre dans celle du commerce équitable, leur permettant une rémunération plus importante. Artisans du Monde refuse de travailler avec les multinationales, ce qui n’est pas par exemple le cas de l’organisme de certification Max Havelaar, qui a dû de fait adapter ses exigences éthiques au marché néolibéral.

« Artisans du Monde » a le poids institutionnel pour interpeler la société civile et le pouvoir politique sur le TAFTA et les accords de libre-échange.

Attention, le commerce équitable ne doit pas aboutir à une déculpabilisation totale de notre consommation de produits importés. Même dans le cadre d’un commerce équitable, dans l’excès, nous pouvons encore porter atteinte à la souveraineté alimentaire des pays en développement !

Vers une régulation des droits des multinationales : the Treaty Alliance

Actuellement, nous vivons dans une corpocratie mondiale. Les multinationales sont les seuls acteurs au monde à ne pas subir de régulation et ne sont pas responsabilisables : les victimes d’un dommage commis par une multinationale n’ont pas de recours. Cela est dû notamment au fait que les filiales sont considérées par le droit comme des acteurs économiques différents (la filiale peut « disparaître » sans que cela nuise au groupe). Il s’agit d’une forte asymétrie entre la réalité économique (le groupe) et le cadre juridique, ce qui permet aux sociétés de travailler en toute impunité sociale et environnementale. Le droit international sur l’écologie et les droits humains est « mou », c'est-à-dire volontaire. L’ONU a tenté sans succès d’encadrer les activités des transnationales depuis les années 1970, mais sans succès. Les transnationales « s’engagent » à tenir des résolutions mais les comportements restent identiques : la recherche du profit par l’externalisation des coûts sur l’humain et la Terre.

85% des transnationales aujourd’hui sont basées dans les pays du Nord et 60% des échanges commerciaux mondiaux se font entre filiales. 147 multinationales dans le monde concentrent 40% du commerce mondial. Ces chiffres incroyables ne sont que le résultat d’une politique libérale mondiale qui fait obstacle à toutes les régulations.

Pour répondre à la nécessité de réguler les activités scandaleuses des transnationales qui bafouent les droits humains et détruisent la planète, en 2014, une résolution a été déposée au conseil de l’ONU à l’initiative de l’Equateur et de l’Afrique du Sud afin de créer un traité qui permettrait de réguler en droit les multinationales au niveau international. Vous serez sûrement heureux d’apprendre que notre beau pays ainsi que tous les pays de l’UE, les USA et le Canada notamment, ont voté contre cette résolution, qui a été néanmoins adoptée. Mais tous les pays du Nord sont absents lors des séances de rédaction du traité. 5 ans seront nécessaires aux négociations mais une première version sera disponible en 2017. Toutefois, sans les pays les plus puissants du monde économiquement, les négociations ont toutes les chances de tourner court, d’où la nécessité pour la société civile de s’investir dans la défense de cette mesure nécessaire, voulue par plus d’une centaine de pays.

Plus d’infos ici : The Treaty Movement (en français)

Le Mandat de Commerce Alternatif

Le Mandat de Commerce Alternatif est un texte développé grâce à des consultations de la société civile en Europe. Il traite d’une nouvelle vision du commerce international qui serait respectueux des droits humains et de l’environnement, resserrerait les inégalités et bénéficierait à toutes les parties. Il développe des questions d’alternatives aux politiques libérales et aux traités de libre-échange, ainsi que la question du développement humain et de sa corrélation à la croissance afin d’aller contre les logiques économiques étriquées et suicidaires de l’Union Européenne.

De nombreux aspects du commerce international et de son cadre sont traités, comme la participation sociale1 au débat, les normes, le secteur de la finance2, les matières premières, l’énergie3, le changement climatique, les appels d’offre publics et la propriété intellectuelle4.

1 Actuellement, Bruxelles par l’intermédiaire des commissaires européens (qui ne sont même pas élus !) décide de la politique économique française. Les peuples devraient contrôler la production, la circulation et la consommation, pas une instance illégitime. Nous ne voulons pas de la négociation actuelle autour de TAFTA et TISA (libéralisation des services, de la santé et de l’éducation dans 51 pays soit 70% des services mondiaux) !

2 Depuis 2010, 37% du PIB de l’Union Européenne a été cédée au secteur financier privé via la dette et les opérations de sauvetage soit 4.500 Milliards d’Euros. Une exigence de transparence serait un strict minimum…

3 L’Union Européenne est actuellement importateur net d’énergie : 54% de l’énergie consommée et 85% du pétrole sont importés. Le mandat appelle à la sécurisation de ces importations par le rééquilibrage des taxations.

4 7 pays contrôlent 95% des brevets, ce qui mène à une intolérable privatisation des savoir-faire. La question des Big Data doit aussi être soulevée pour exiger la transparence : qui garde les informations, où et dans quel but ?

Plus d’infos ici : AlternativeTradeMandat

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